Brève histoire d’une médaille

Traduction sur cuivre du statut général des fonctionnaires, la médaille de la fonction publique française permet, à côté des décorations, de reconnaître l’engagement desagents en faveur du service public.

Une médaille symbolisant la conception française de la fonction publique ? L’idée a germé dans la tête d’Anicet Le Pors, alors ministre de la Fonction publique et des réformes administratives, en même temps qu’était lancée l’élaboration du statut général des fonctionnaires en 1982. Un comité de sélection est constitué et un concoursorganisé par la direction des monnaies et médailles. Son thème : donner à voir l’unité et la diversité de la fonction publique française. Une trentaine d’artistes participe. « Il estintéressant de noter que beaucoup ont retenu comme éléments symboliques la SNCF et la Sécurité sociale. Alors que ce ne sont pas des fonctions publiques !» se souvient Anicet Le Pors. C’est le sculpteur Michel Baduel qui est sélectionné. Il lui est toutefois demandé de retravailler le revers.

TIRAGE LIMITÉ

« Derrière la face figurative, qui était dominée par la réalité administrative, nous souhaitions quelque chose de plus symbolique afin d’exprimer le fonctionnement en réseaux. L’une des membres de mon cabinet, dont le mari travaillait dans l’informatique, a proposé de s’inspirer des circuits électroniques imprimés », explique Anicet Le Pors. Frappée par la Monnaie de Paris à quelques centaines d’exemplaires, elle a été remise à l’occasion d’événements, notamment à des maires lors de visites officielles et à dessyndicalistes. Elle n’est plus commercialisée depuis plusieurs années mais peut êtreproduite à la demande par lot de 25 ou 50. Pour le trentième anniversaire du statutgénéral des fonctionnaires, Marylise Lebranchu, à l’époque ministre de laDécentralisation, de la fonction publique et de la réforme de l’Etat, en a fait frapper pourles offrir

aux intervenants du colloque qu’elle avait organisé le 13 juillet 2013. Anicet Le Pors en a passé commande récemment pour honorer les personnes à qui il souhaite « faire plaisir », en particulier à l’occasion des remise de décorations qu’il lui arrive encore d’effectuer.

BEAUCOUP D’ÉMOTION

Objet d’art honorifique, cette médaille est à distinguer de celle du ministère de la Fonctionpublique qui arbore l’hôtel de Castries – siège du ministère –

, et que la plus célèbre cantinière de France, Evelyne Debourg, s’est vu remettre en 2006.« Christian Jacob, alors ministre de la Fonction publique, m’a donné cette magnifiquemédaille en même temps que mon trophée de meilleure cantinière de France. Ça m’a beaucoup touchée car elle est normalement décernée aux énarques », relate EvelyneDebourg, désormais retraitée. Elle était en poste à l’école d’Ebreuil, petite commune de l’Allier de 1 250 âmes.

La médaille de la fonction publique est aussi à différencier des médailles d’honneurrégionales, départementales ou communales qui récompensent les années de services (20, 30 ou 35 ans) rendus aux collectivités. Bien que moins illustres que la création de Michel Baduel, les médailles d’honneur portent en elles le témoignage d’une reconnaissance très appréciée des agents qui les reçoivent. « Il y a toujours beaucoup d’émotion lors de la cérémonie, qui constitue un moment fort de commémoration du temps consacré au service public », constate Yvan Brégeon, directeur général desservices de Pessac (1 000 agents, 65 800 hab., Gironde).

Ce que confirme Lyndia Desnoues, DGS de Champigny-sur-Marne (2 300 agents, 77 500 hab., Val-de-Marne). « Le fait d’avoir servi le service public pendant un certain nombre d’années est officiellement reconnu par la collectivité, les élus, les collègues, lafamille. Sans distinction entre catégories hiérarchiques puisque ce sont les années deservices qui comptent. Tout le monde est à égalité et mélangé », souligne-t-elle.

Encadré(s) :

A la demande

La médaille de la fonction publique peut être frappée à la demande pour 100 à 120 eurosl’unité, selon la quantité commandée.

TÉMOIGNAGE – « Un symbole de transversalité, d’agilité et de modernité »

« J’ai reçu la médaille de la fonction publique des mains d’Anicet Le Pors le jour où il m’a remis les insignes de chevalier de l’Ordre national du mérite. Il ne m’a rien dit sur le moment et me l’a offerte, en aparté, après la cérémonie officielle, en témoignage, m’a-t-il assuré, de mon engagement en faveur du service public. Je ne m’y attendais pas, j’en aiété très touchée. Elle est exposée dans ma bibliothèque à côté des ouvrages que j’apprécie. Car si je suis arrivée là où je suis, c’est grâce à la lecture qui éveille à laréflexivité et à l’esprit critique. Je trouvais qu’elle avait toute sa place à cet endroit. Cette médaille symbolise la conception française de la fonction publique. L’idée detransversalité et d’agilité y était déjà inscrite. Sa modernité apparaît à travers le système de réseaux au revers. C’est sur cette face que sont inscrits mon prénom et mon nom. Et je peux dire que je reste très fière de contribuer, au quotidien, au service public et de faire partie de cette communauté engagée d’agents, dont nous célébrons cette année lesquarante ans. »

Décentralisation, rayonnement, interdépendance…

A l’avers de la médaille est inscrit « fonction publique française » En lettres capitalesentrelacées. Composant une solide architecture, elles se superposent à une carte deFrance stylisée auréolée de rayons. Ces faisceaux symbolisent la décentralisation, qui était, en 1982, une priorité du gouvernement, et le rayonnement de la représentation de la fonction publique française à l’étranger. La composition au revers, avec ses fils et sessoudures analogues à un circuit électronique, exprime à la fois la modernité del’administration et une conception du fonctionnement administratif où l’interdépendancedes fonctions l’emporte sur la hiérarchie des pouvoirs.

Maud  Parnaudeau