Ordre National du Mérite à Gaëlle Abily – Brest, 28 novembre 2014

Monsieur le Maire, Mesdames ; Messieurs, Chère Gaëlle,

 

Merci Monsieur le Maire pour votre accueil toujours aussi amical,

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De droite à gauche : François Cuillandre, maire de Brest, Gaëlle Abily, Anicet Le Pors salle Richelieu à l’Hôtel de ville de brest

Je veux tout d’abord saluer les grands parents de Gaëlle, ses parents, son mari, ses enfants,

Ce n’est pas la première fois, Monsieur le Maire, que je suis amené à remettre une décoration dans cette grande salle de la mairie de Brest. La première fois c’était il y a trente et un ans, la récipiendaire était une conseillère municipale de Brest, ancienne adjointe au Maire, mon amie Yvonne Lagadec. Je m’en souviens pour deux raisons. Le Maire, un de vos prédécesseur mais qui n’était pas de la même couleur politique que vous, Jacques Berthelot, m’avait accueilli par ces mots : « Monsieur le ministre, je vous préviens, il n’y aura pas de champagne ! » Le coup était rude. Le débat étant situé à ce niveau, je me suis dit que je ne pourrai pas suivre ; et je n’ai pas suivi. La deuxième raison est que, lorsque j’ai achevé mon discours, du type  de celui que je viens d’entreprendre, je me suis retourné vers Yvonne et je lui ai demandé «  La médaille ? » Elle m’a répondu « Oh, je l’ai oubliée à la maison ! » J’ai du alors siffler la fin de la première mi-temps  et nous avons pu quelques minutes plus tard, la médaille récupérée, terminer la cérémonie dans la dignité et la bonne humeur.

Une remise de décoration est toujours le moment de s’interroger sur sa vie, sur ses valeurs, sur la place que l’on occupe dans la société, sur le rapport aux autres. C’est vrai surtout bien sûr pour le ou la récipiendaire.

Se manifestent en cette occasion les opinions les plus diverses. Un éminent juriste de mes amis, Guy Braibant, avait l’habitude de dire en ces occasions : « Une décoration ça ne se demande pas, ça ne se refuse pas, ça ne se porte pas ». Moyennant quoi il portait les siennes allègrement.

Mais l’attribution d’une décoration est aussi un enjeu. J’ai connu une période où les personnes qui étaient engagées dans un mouvement associatif, syndical ou politique contestataire n’avaient jamais de décoration. Cela était le privilège des élites, d’un autre monde. Par suite, dans les mouvements où je militais, on ne se posait pas la question et lorsqu’il nous arrivait d’en parler c’était pour dire notre dédain. Mais nommé ministre, j’ai eu à décerner des décorations et, dès lors, j’ai eu à me poser la question des critères d’attribution. J’ai pensé qu’il convenait de réparer les injustices et d’en attribuer à ceux qui, jusque-là, en avaient été privés. J’appréhendais un peu leur réaction connaissant l’état d’esprit des plus rudes d’entre eux. Mais à ma surprise ils ont été heureux et reconnaissants de cette proposition et, quant je leur ai remis cette décoration, certains ont écrasé une larme. J’ai aussi l’exemple de cet ami, ancien ministre, qui avait juré que jamais il n’accepterait une décoration ; il l’a pourtant accepté lorsqu’on lui en a fait la proposition et se l’est fait remettre par le Premier ministre en présence de plusieurs ministres et l’a dédiée à son père mort à Auschwitz. Une décoration touche donc souvent à l’intime.

Ce qui a été pour moi décisif, c’est la demande de rencontre que m’a faite un jour, pendant la période ministérielle, le Grand Chancelier de la Légion d’honneur. Je l’ai reçu, un général bardé de décorations. Après quelques échanges convenus, il m’a tenu à peu près ce discours : « Monsieur le ministre, je suis chargé par le Conseil de l’Ordre, de vous dire que nous ne contestons pas évidemment les propositions que vous avez faites lors des dernières promotions, il s’agit sans aucun doute de personnes méritantes, mais il est d’usage d’équilibrer les catégories sociales dans les promotions et, s’agissant de celles que vous nous avez présentées, il nous semble que la catégorie des syndicalistes était sur-représentée ». Sur le coup j’ai pensé que je n’avais pas bien compris, je suis resté sans voix et il est reparti. Choqué, j’ai demandé à l’administration d’établir une statistique sur les vingt dernières année de laquelle il est ressorti que pas un seul syndicaliste n’avait été nommé durant ces deux décennies. Je m’en suis entretenu avec le Président François Mitterrand en fin de l’un des conseils des ministres qui a suivi. Il m’a dit qu’il ferait les remontrances nécessaires au Conseil de l’Ordre.

Je me suis alors attaché à rechercher les bases de légitimité des décorations. Je pense les avoir trouvées dans l’article 6 de la Déclaration des droits de l’Homme et du Citoyen de 1789 où l’on relève la phrase suivante. « Tous les Citoyens étant égaux (aux yeux de la loi) sont également admissibles à toutes dignités, places et emplois publics, selon leur capacité, et sans autre distinction que celle de leurs vertus et de leurs talents. ». Recevoir une décoration ce n’est donc pas futile ; c’est exercer un droit.

Capacités, vertus, talents, nous pouvons dire qu’en nombre ils bien caractérisent Gaëlle Abily.

ACH_7190Gaëlle a fait des études supérieures en économie et en relations internationales, matières qui nous rapprochent également.

Elle s’est engagée dans la vie professionnelle en 1997 comme chargée de mission à l’observatoire emploi-formation de la Communauté urbaine de Brest. Puis elle a été chargée de projets européens et internationaux, avant de rejoindre la direction du développement économique. L’exercice de ces fonctions lui sera utile dans ses activités ultérieures.

Simultanément elle s’est engagée dans le militantisme politique. Elle a été secrétaire départementale du Parti communiste français de 2001 à 2005 ; membre du Conseil National du PCF de 1999 à 2013. Naturellement, elle a été candidate de ce fait à de multiples élections : municipales, cantonales, régionales, législatives, sénatoriales, européennes. La seule qu’elle n’ait pas pratiquée c’est la présidentielle ; mais il lui reste beaucoup de temps pour pallier ce manque.

En 1998, elle est élue au Conseil régional de Bretagne ; elle est la plus jeune élue de toutes les régions. Elle exerce pendant quelques années au sein de la « Commission formation initiale et continue, enseignement supérieur et apprentissage. »

Mais c’est à partir de 2004 qu’elle pourra donner toute sa mesure, élue vice-présidente de la région Bretagne et chargée d’une responsabilité nouvellement créée l’égalité femmes/hommes. De là date notre première rencontre puisqu’à la même époque je présidais le Comité de pilotage pour l’égal accès des femmes et des hommes aux emplois supérieurs des fonctions publiques.

Elle engage la création du Conseil régional pour l’égalité femmes-hommes en Bretagne, un réseau réunissant régulièrement 600 membres.

C’est ensuite la réalisation, en 2006, de la première Biennale de l’égalité femmes-hommes. Je me souviens y avoir participé avec Pierre Maille. La dernière manifestation s’est tenue à Lorient en 2014 et a concerné plus de 4000 personnes.

Puis c’est l’adoption à l’unanimité des organisations syndicales et de l’assemblée régionale d’un plan d’action pour l’égalité hommes-femmes en faveur des agents de la Région.

Intervient également l’adhésion de la Région à la Charte européenne pour l’égalité dans la vie locale.

C’est encore l’adoption d’une Charte de partenariat pour la qualité de l’emploi » (dialogue social et égalité) en Bretagne qui conditionne l’attribution des aides publiques.

C’est en raison de cette impressionnante activité de terrain que le « Label égalité », est décerné à la Bretagne par le ministère de la cohésion sociale.

Sur cette base la responsabilité de Gaëlle Abily va passer au niveau national et international. On enregistre, tout d’abord, la reconnaissance par le ministère des droits des Femmes, de la Bretagne « territoire d’excellence » pour l’égalité femmes-hommes ». Elle est accompagnée d’une expérimentation des salariées de l’entreprise Doux.

Gaëlle est ensuite nommée par le Premier Ministre au Haut Conseil à l’égalité femmes-hommes.

Elle remet un rapport sur les stéréotypes masculin-féminin à la ministre chargée du droit des femmes.

Elle développe enfin des actions internationales dans le cadre des Nations Unies en Algérie et à la demande du gouvernement, au Mali.

On le voit, il s’agit à la fois d’une activité de terrain portée jusqu’aux plus hauts niveaux et présentant trois caractères : un engagement et un travail personnels, un souci permanent de rassemblement de tous les acteurs de l’égalité hommes-femmes dans leur diversité, une réflexion théorique sur une grande question de société : l’égalité effective entre les femmes et les hommes.

Je dois également évoquer l’activité de Gaëlle Abily dans le domaine de la culture à Brest. Mais nous sommes à Brest et les acteurs sont là, aussi je laisserai Gaëlle en parler mieux que je ne saurais le faire.

Elle a été nommée en 2008 adjointe au Maire de Brest, chargée précisément de la culture. Elle en est aussi responsable au niveau de la communauté.

Sa démarche y est celle d’une co-construction culturelle avec les acteurs du territoire et la population. Qu’il me soit permis ici d’avoir une pensée pour mon ami Yves Moraud, qui nous a quitté il y a quelques mois et qui jouait un rôle si important dans la vie culturelle de Brest et de la région.

Gaëlle s’est appliquée la promotion de nouveaux axes en direction des jeunes, des travailleurs, des préoccupations de la population et la réalisation de « Lettres de Brest ».

DSC01592lle s’est engagée dans de grands projets : l’ouverture de la Maison du Théâtre et du Mac Orlan. Elle a assuré la présence de la culture autour de l’installation du Tram.

Couronnement de ce travail dans cette autre volet de son activité : Gaëlle a été élue, en juillet 2014, vice-présidente de la Fédération Nationale des Collectivités pour la Culture ( FNCC).

Plus généralement, je veux encore évoquer son action sur les terrains de la laïcité à St-Marc et de la défense de l’emploi et de la dignité des travailleurs et travailleuses, notamment son soutien récent aux salariés et salariées de l’entreprise Gad.

Son rapport au sport et à la culture c’est sa pratique du basket, de l’aviron, de la course à pied et de la guitare : elle est diplômée du Conservatoire de musique de Brest pour cet instrument.DSC01589_cr

n le voit, les capacités, les vertus et les talents de Gaëlle Abiliy justifient pleinement l’honneur qui lui est fait aujourd’hui.ACH_7216

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