Bretagne-Ile de France – Voeux aux Bretonnes et aux Bretons de l’Ile-de-France 2016

Éloge du mille-feuilles

Escaro

 La région a fait la plus récente actualité après le redécoupage du territoire national en début d’année. Pour justifier l’importance des différences instances territoriales on a eu souvent recours aux comparaisons pâtissières : l’administration serait pareille à un mille-feuilles superposant une multitude de niveaux de décisions (la ministre chargée de la décentralisation préférant, elle, se référer au quatre-quarts). Or, en matière d’organisation de l’espace territorial national il n’y a pas mille niveaux pertinents, mais on peut en retenir six : la commune, les intercommunalités, le département, la région, la nation et l’Europe. Trois sont à dominante politique : la commune, le département et la nation ; trois à dominante économique : l’intercommunalité, la région, l’Europe. En démocratie le politique doit l’emporter sur l’économique quand bien même tous ces niveaux ont leur importance. Les choses étant ainsi ordonnées on peut en appeler à l’histoire de régions aussi clairement identifiée que la Bretagne dans la plénitude de sa géographie, à son histoire, à sa culture, à sa place dans la République française indivisible. Je souhaite aux Bretonnes et aux Bretons de l’Ile de France et d’ailleurs une bonne année 2016, réservant au mille-feuilles, quatre-quarts et autre kouign aman le soin d’en agrémenter les moments heureux, le verre à la main.

 

Migrants, le droit et la peur – Regards croisés/16 – décembre 2015

LE DROIT D’ASILE MIROIR DE LA CITOYENNETÉ

Anicet Le Pors fut ministre des deuxième et troisième gouvernements de Pierre Mauroy de 1981 à 1984. [1]

 

La question de l’étranger est présente dans toutes les dimensions de la citoyenneté. Dans ses valeurs puisque l’intérêt général se définit sur la base de la communauté nationale. Dans son exercice: les droits et obligations du sujet de droit. Dans sa dynamique, qui conduit à s’interroger sur la nature de la mondialisation et le genre humain comme sujet de droit. Le droit d’asile se situe aux interfaces de ces thèmes. Les réponses apportées au fil du temps ont beaucoup varié. Pour éclairer les problèmes d’aujourd’hui, il est donc utile de revenir sur l’émergence et la réalité du droit d’asile dans notre pays et son insertion dans une réglementation internationale de plus en plus déterminante.

 

Les déterminants des politiques publiques

 Copie de Droit-d-asile2-CouvertureAprès la seconde guerre mondiale, l’ordonnance du 2 novembre 1945 fixe le cadre juridique des conditions d’entrée et de séjour des étrangers en France. Maintes fois modifiée, elle a néanmoins été largement appliquée jusqu’aux années 1970, malgré les évènements dramatiques associés à la décolonisation. Une régression de l’accueil a lieu ensuite en raison du ralentissement de l’activité économique[2]. L’arrivée de la gauche au pouvoir en 1981 a conduit, jusqu’en 1993, à des régularisations assez importantes, puis à des mesures coercitives de renvoi, tandis que prenait naissance une politique intergouvernementale de l’asile au niveau européen[3]. Se développe ensuite, de 1993 à 1997 une politique coercitive vis-à-vis des étrangers tandis que s’engage un transfert de compétences, une harmonisation des politiques d’asile au niveau européen dans le cadre des accords Schengen du 14 juin 1995. La cohabitation de 1997 à 2002 enregistre des modifications juridiques substantielles sans pour autant transformer la situation dans l’immédiat : traité d’Amsterdam du 2 octobre 1997, loi Chevènement du 11 mai 1998, Charte des droits fondamentaux adoptée au sommet de Nice le 27 décembre 2000. De 2002 à 2012 se développe une politique sécuritaire à partir des lois de novembre-décembre 2003, qui anticipent les directives européennes, jusqu’à la loi de transposition du 29 juillet 2015. L’influence de l’Union européenne est croissante dans la perspective d’un régime d’asile européen commun. Les politiques migratoires dépendent donc de trois facteurs : le niveau d’activité économique, l’influence de l’Union européenne, l’orientation politique du gouvernement en place.

Ces politiques ont une influence directe sur la part prise par la France dans les flux migratoires. Le Haut Commissariat aux Réfugiés des Nations Unies (HCR) a comptabilisé au cours des dernières années de 10 à 12 millions de réfugiés dans le monde et 1,1 million de demandeurs d’asile. En 2013, 77 % d’entre eux se trouvaient en Afrique et en Asie, 15% en Europe et 8% dans les Amériques. La France en protégeait 232 000, l’Allemagne 572 000, les États-Unis 264 000, le Royaume Uni 126 000, la Suède 114 000 ; mais rapporté au nombre d’habitants, la France protège trois fois moins de personnes que ce dernier pays.

L’asile ne représente qu’environ 6% des titres de séjour accordés. En 2013, la France a délivré 204 000 titres de séjour se répartissant selon les catégories suivantes : économique 17 800, familial 93 100, étudiant 62 600, humanitaire 17 400 dont 11 400 au titre de l’asile.

 

La conception de l’asile

 Les peuples ont toujours pratiqué l’asile, mais selon des motifs et des modalités très divers. En France, l’Église en a eu le monopole pendant tout le Moyen Âge. Elle accueillait qui elle voulait dans les lieux placés sous son autorité et pouvait frapper d’excommunication le monarque qui violait ces dépendances. Par l’Édit de Villers-Cotterêts de 1539, François 1er a mis fin à ce monopole. Par la suite, la monarchie s’est montrée peu favorable à l’asile. La Révolution française va initier la réputation de la « France terre d’asile » par l’article 2 de la Déclaration des droits de 1789, qui appelle à la résistance à l’oppression, mais surtout par la constitution de 1793 qui, outre qu’elle décrète le droit à l’insurrection, s’exprime ainsi sur l’asile : « Le peuple français est l’ami et l’allié naturel des peuples libres » (art. 118), « il donne asile aux étrangers bannis de leur patrie pour la cause de la liberté. Il le refuse aux tyrans » (art. 120). Le XIX° siècle sera accueillant (Frédéric Chopin, Heinrich Heine). Le XX° siècle pourra être considéré comme le siècle des réfugiés : les Arméniens, les Russes, les Allemands, les Espagnols, les Juifs. Des instruments juridiques internationaux vont se mettre en place dans l’entre deux guerres, mais surtout après la seconde guerre mondiale. Le droit d’asile figure à l’article 14 de la Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948, le HCR est créé en 1950, la Convention de Genève est adoptée le 28 juillet 1951. Ne concernant à l’origine que les réfugiés antérieurs à son adoption, elle devient de portée générale par le Protocole de New York de 1967. En France, en raison de la crise et des séquelles de la guerre, des sentiments xénophobes se développeront, mais elle accueillera néanmoins 1 million de demandeurs d’asile à la fin des années 1930, pour une population de 38 millions d’habitants. Toutefois, l’État français se déshonorera en livrant nombre d’entre eux à l’occupant nazi. La France ne ratifiera qu’avec retard les conventions internationales. Par la loi du 25 juillet 1952 est créé l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) et la Commission de recours des réfugiés (CRR), qui deviendra en 2008 la Cour nationale du droit d’asile (CNDA). À grands traits on peut caractériser l’évolution historique du droit d’asile en disant que l’on est passé, d’une part, de la désignation d’un lieu à la protection de la personne et, d’autre part, d’un droit discrétionnaire à une protection nationale mais surtout internationale.

La procédure du droit d’asile est organisée dans la plupart des pays en deux phases. Une phase administrative se dédouble en une séquence d’admission au séjour, pour vérifier que la demande n’est pas « manifestement infondée », elle a lieu en France en zone d’attente ; puis une séquence de dépôt de la demande d’asile à l’OFPRA, établissement public qui instruit cette demande, prend sa décision, et en cas d’accord, assure la protection administrative et juridique du réfugié. La deuxième phase est juridictionnelle, auprès de la CNDA, instance de recours contre les décisions de rejet de la demande par l’OFPRA. Il existe ensuite une possibilité (très limitée) de pourvoi en cassation devant le Conseil d’État. On retrouve ces quatre séquences dans la plupart des pays. Les possibilités d’intervention du HCR aux différents niveaux sont très variables.

L’article 33 de la Convention de Genève pose le principe de non refoulement de l’étranger sur le territoire d’accueil. Reconnu réfugié, celui-ci bénéficie de droits et de garanties prévus d’une part par la Convention de Genève, d’autre part par la législation interne du pays d’accueil. En France, ces droits sont proches de ceux des nationaux, à l’exception du droit au travail qui connaît des restrictions (accès à la fonction publique, par exemple) et du droit de vote. Outre l’effet suspensif de toute décision de renvoi durant la procédure, des garanties sont prévues en cas de renvoi (nécessité d’une décision de justice, pas de renvoi vers un pays à risques).

 

L’octroi de l’asile

Il convient tout d’abord de ne pas confondre le demandeur d’asile et le réfugié. L’asile correspond à une situation de fait en même temps qu’il est un terme générique couvrant toute la matière. La qualité de réfugié est un statut juridique. Le droit d’asile permet de distinguer plusieurs catégories : l’asile constitutionnel, l’asile des réfugiés relevant du mandat du Haut commissariat des réfugiés des Nations Unies (HCR), l’asile des réfugiés au sens de la Convention de Genève, l’asile au titre de l’unité de famille, la protection subsidiaire, la protection temporaire, les asiles discrétionnaire et de fait. Le mot migrant, lui, n’a pas de signification juridique particulière. C’est l’article 1er de la Convention de Genève qui définit le plus clairement la qualité de réfugié : « Le terme « réfugié » s applique à toute personne qui (…) craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social, ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité, et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays … ». Se trouvent ainsi combinés un élément subjectif (« craignant ») et un élément objectif (« avec raison » ). La crainte de persécution doit être actuelle, personnelle et d’une certaine gravité. La qualité de réfugié est « reconnue », c’est-à-dire qu’elle a un caractère rétroactif. L’État qui reconnaît substitue sa protection à celle de l’État de nationalité.

La pratique de l’asile montre qu’il est erroné de distinguer radicalement les demandeurs d’asile et les migrants économiques. Tous les demandeurs d’asile ont aussi des raisons économiques : comment imaginer qu’un étranger persécuté dans son pays puisse y obtenir un emploi et y mener une vie normale ?

L’Union européenne avait décidé d’établir une liste de pays d’origine sûrs (POS), mais elle n’y est pas parvenue en raison des désaccords entre pays membres. Certains pays ont alors décidé d’établir la leur, dont la France, sous la responsabilité de l’OFPRA. Cette liste est régulièrement contestée par le Conseil d’État et les juges de l’asile n’en tiennent généralement pas compte.

Outre le rejet à l’issue d’une procédure normale, l’asile peut être refusé par la voie de l’exclusion lorsqu’il y a de sérieuses raisons de penser que le demandeur s’est lui-même rendu coupable de crime contre la paix, d’un crime de guerre ou d’un crime contre l’humanité. Le titre de séjour, de dix ans pour un réfugié, peut être retiré si les conditions qui l’avaient justifié cessent, en cas de changement politique intervenu dans le pays d’origine notamment. Il peut aussi y avoir remise en cause dans le cas de fraude ou de changement de situation individuelle.

Réfugiés. Cour Nationale du Droit d'Asile.

Un système « à bout de souffle » ?

 C’est un véritable « parcours du combattant » que doit effectuer le demandeur d’asile pour tenter de faire aboutir son projet. La retenue en zone d’attente pour vérifier si sa demande n’est pas « manifestement infondée » peut durer jusqu’à 26 jours. Il dispose ensuite d’un visa de 8 jours pour retirer un dossier de demande en préfecture. Il doit déposer son dossier en français à l’OFPRA dans un délai de 21 jours. Il reçoit alors une autorisation provisoire de séjour de 3 mois renouvelable. L’OFPRA entendra le demandeur et statuera dans un délai moyen de 5 mois. En cas de rejet de la demande l’intéressé pourra exercer un recours devant la CNDA dans le délai d’un mois suivant la notification du rejet de sa demande. La juridiction statuera dans un délai moyen de l’ordre de 6 mois. Le pourvoi en cassation est réduit et incertain. Pour le demandeur d’asile, il s’agit donc d’une procédure à délais courts, difficile par la constitution du dossier en français, coûteuse, avec des relations parfois difficiles avec les administrations concernées.

Le système a connu cependant une évolution structurelle plutôt positive au cours des dix dernières années. En 2005, le CESEDA a remplacé l’ordonnance de 1945. La CRR est devenue la CNDA en janvier 2008 et sa gestion a été placée sous l’autorité du Conseil d’État l’année suivante, échappant ainsi au non-sens de la gestion administrative, budgétaire et statutaire de l’OFPRA, l’organisme dont elle est chargée de réviser les décisions. L’aide judiciaire a été attribuée sans condition de régularité de séjour à compter du 1er décembre 2008.

La statistique de l’asile révèle traduit une régression de l’attractivité de la France au cours des dernières années. Selon le HCR, la France a accueilli en 2014, 59 030 demandeurs d’asile contre 60 461 en 2013. Elle se situe désormais derrière l’Allemagne avec 173 000, les États-Unis, la Turquie, la Suède et l’Italie. Encore première destination d’Europe en 2011, elle n’est plus qu’en 4e position. De 2013 à 2014, la progression des demandes dans l’ensemble de l’Union européenne a été de 44%, 58% pour l’Allemagne, 38% pour la Suède, 96% pour le Danemark, tandis que la demande régressait de 1,2% en France. La position de la France est aujourd’hui encore plus défavorable si on rapporte les demandes à la population : 2,2 pour 1000 habitants contre 24,4 en Suède, 17,5 à Malte, 12, 2 au Luxembourg.

Le taux global de décisions de protection a été au cours des dernières années de l’ordre d’un quart des demandes.

La Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) veille au respect des droits dans le traitement de l’asile. Elle a donné des définitions et des interprétations. Le Conseil constitutionnel, de son côté, dans plusieurs décisions, a rappelé un certain nombre de principes : affirmation de la souveraineté nationale, respect des droits de la défense, plénitude des garanties légales, indépendance de la juridiction administrative, encadrement strict des notions d’asile interne et de pays d’origine sûr.

La loi du 29 juillet 2015 a effectué la transposition en droit interne de directives européennes. Elle est plus soucieuse de protection que celle du quinquennat précédent. Une claire distinction est maintenue entre le droit d’asile et le droit des étrangers. On peut retenir comme avancées significatives : l’assistance au demandeur d’un conseil lors de l’entretien à l’OFPRA ; le caractère suspensif du recours en procédure accélérée ; le développement rapide des capacités d’hébergement des Centre d’accueil des demandeurs d’asile (CADA). Toutefois, on peut émettre des réserves : la décentralisation des résidences des demandeurs d’asile sur le territoire national, sous peine de suppression des allocations en cas de refus; le raccourcissement des délais à 4 mois devant l’OFPRA et 5 mois devant la CNDA est souhaitable sous la condition que des moyens suffisants soient accordés à ces deux instances pour leur permettre une instruction approfondie de chacune des demandes d’asile ; la limitation à 5 semaines du délai d’instruction et de jugement par la CNDA en cas de procédure accélérée n’est pas compatible avec la tenue de formations de jugement collégiales. Cette loi apparaît donc insuffisante pour répondre aussi bien aux problèmes de l’heure qu’aux nécessités de la mondialisation.

 

Pour une « révolution culturelle » de l’asile

 4-PUF_LEPOR_2011_01_L148L’asile pose la question des relations qui peuvent être établies entre le citoyen d’ici et le citoyen d’ailleurs. Cette rencontre forme leurs citoyennetés respectives, mais leurs situations ne sont pas égales : l’accueillant est en position dominante en tant qu’occupant du lieu d’accueil sollicité. C’est cependant à lui qu’incombe la responsabilité de donner sens à son hospitalité, d’établir des règles de droit qui en permettent la mise en œuvre dans un cadre national et de contribuer à l’établissement d’un régime d’asile commun au plan international.

Le fonctionnaire de l’OFPRA comme le juge de la CNDA doivent posséder de sérieuses compétences tant en matière de droit d’asile que de connaissances géopolitiques. Mais cela n’est pas suffisant, ils doivent aussi s’interroger en permanence sur leur responsabilité de citoyen dans les décisions qu’ils prennent d’accorder ou de refuser l’asile. Pour le juge notamment, il y a là une question de mentalité qui implique que la clarté soit faite sur trois questions.

S’agit-il simplement d’appliquer le droit ou de rendre la justice ? Le droit positif n’est qu’un instrument et, en matière d’asile, l’appréciation des faits concourt de manière déterminante à la formation de l’intime conviction du juge. La décision est rendue « au nom du Peuple français », ce qui investit le juge d’une parcelle de souveraineté nationale.

La preuve de la persécution est-elle exigible ? Aucun texte national ou international ne prévoit la nécessité de la preuve à la charge du demandeur d’asile. Le Guide des procédures du HCR met l’accent sur la crédibilité et la cohérence d’ensemble du récit, qui doit servir de base à la formation de l’intime conviction du juge. La procédure du jugement doit donc avoir pour objectif d’être un réducteur d’incertitude, quand bien même ne peut être complètement réduit le doute qui subsiste.

Quelle est la portée des contradictions, voire du mensonge affectant la demande d’asile ? Face aux obstacles de toute nature élevés devant le demandeur d’asile dans le parcours qu’il doit effectuer, il n’est pas étonnant que celui-ci tente de lever ses difficultés en adaptant son comportement : il peut s’être remis au départ à un rédacteur occasionnel en français qui a pu prendre quelque liberté avec son récit ; rectifiant par la suite, le demandeur introduira des différences qui ne manqueront pas de lui être opposées ; les repères en vigueur dans sa vie antérieure ne sont pas ceux qui lui sont désormais utiles (composition familiale, coutumes, calendrier) ; il peut souhaiter améliorer son argumentation en prenant quelque liberté avec la réalité, etc. La qualité du jugement en matière d’asile requiert donc une citoyenneté éprouvée du juge. D’où de fortes disparités dans les taux d’accord d’asile selon les présidences des formations de jugement.

Enfin, en raison de son histoire et de sa tradition ancienne, la France est légitime à faire des propositions d’évolution de la réglementation internationale, tant au niveau européen que mondial, le contexte ayant beaucoup changé depuis la Convention de Genève de 1951 et même du protocole de New York de 1967. Il ne s’agirait pas de modifier ces dispositions consacrées, mais de les compléter en tenant compte notamment du fait que plus des trois quarts des réfugiés se trouvent en Afrique et en Asie ; que la reconnaissance ou la place de la protection subsidiaire et d’autres formes d’asile doivent être révisés ; que le rôle du HCR doit être accru ; que les droits et les garanties juridiques doivent être consolidés, etc.

 

« Hospitalité signifie le droit qu’a un étranger arrivant sur le sol d’un autre de ne pas être traité en ennemi par ce dernier […], le droit qui revient à tout être humain de se proposer comme membre d’une société en vertu du droit à la commune possession de la surface de la Terre, laquelle étant une sphère, ne permet pas aux hommes de se disperser à l’infini, mais les contraint à supporter malgré tout leur propre coexistence, personne, à l’origine, n’ayant plus qu’un autre le droit de se trouver en un endroit quelconque de la Terre. Cependant, ce droit à l’hospitalité, c’est-à-dire le droit accordé aux nouveaux arrivants étrangers, ne s’étend pas au-delà des conditions de la possibilité d’essayer d’établir des relations avec les premiers habitants. C’est de cette manière que les continents éloignés peuvent établir entre eux des relations pacifiques, qui peuvent finir par être légalisées. »

Emmanuel Kant, Pour une paix perpétuelle, 1795

 

1 Président des formations de jugement de la Cour nationale du droit d’asile

(CNDA, 2000-2013).

– Président fondateur en 2011 de l »Association française des juges de l’Asile (AFJA).

– Ancien membre du Haut Conseil à l’intégration (1990-1993).

– Auteur du « Que sais-je ? » Le droit d’asile, PUF, 2011 (4e éd.) et du « Que sais-je ? » La citoyenneté, PUF, 2011 (4e éd.), de Juge de l’asile, Michel Houdiard Éditeur, 2010, du rapport interministériel Immigration et développement économique et social, La Documentation française, 1975.

[2] Rapport interministériel sous la direction de A. Le Pors, Immigration et développement économique et social, La documentation française, 1975. Ce rapport, qui s’appuyait sur les modèles mathématiques alors utilisés, contestait les affirmations officielles sur les étrangers concernant l’emploi, le budget social et la balance des paiements de la nation.

[3] On notera la création du Haut Conseil à l’intégration en 1993 dont Anicet Le Pors sera membre jusqu’en juin 1993 démissionnant pour ne pas cautionner les lois Pasqua sur la nationalité.