Cadres de la fonction publique et idéologie managériale

Bulletin du syndicat des Inspections de l’Education nationale – Force ouvrière

« Cadres de la fonction publique et nouveau management public

« En presque 40 ans, de nombreuses attaques plus ou moins directes ont contribué au « mitage » du statut général de la fonction publique. Depuis 2018 le gouvernement tente de « réinventer » le service public en mobilisant notamment la notion de « nouveau management

 public ». Ses cadres sont de plus en plus souvent exposés à des discours et des formations les enjoignant « d’augmenter leurs compétences managériales ».

IEN-FO : En quoi ce « nouveau management public » que s’emploie à mettre en place le gouvernement remet-il en cause les principes d’égalité, d’indépendance et de responsabilité, principes organisateurs historiques du statut général de la fonction publique ?

A.LP : Le Nouveau Management Public (NMP) s’inscrit  naturellement au sein de l’idéologie managériale qui tend à la généralisation  des critères de gestion de l’entreprise privée à l’ensemble de la société. Économiquement, elle prend appui sur les axiomes de la théorie néoclassique élaboré à la fin du XIXe siècle.  Or, les exigences méthodologiques de la gestion du service public finalisé par l’intérêt général par nature multidimensionnel sont d’un niveau bien supérieur à celles de l’entreprise privée axé sur le taux de rentabilité interne ou le retour sur investissement. Il y a donc bien une nécessité d’approfondissement théorique de la notion d’efficacité sociale, mais le  NMP n’y répond pas par la simple transposition du privé au public. Il est évidemment contraire au principe d’égalité en faisant du contrat une source autonome du droit de la fonction publique, introduisant par là une concurrence entre modes de recrutement, de formation, de gestion, de droits et obligations, etc. Il est contraire au principe d’indépendance puisque l’agent recruter sur contrat n’est tenu que respect des règles posées par celui-ci dans le cadre de sa mission et pendant la durée de celle-ci. Il est contraire au principe de responsabilité puisqu’il n’a d’autres comptes à rendre que ceux correspondant au champ et à la nature de son activité. Le NMP fait ainsi courir trois risques au service public : de confusion des finalités, de conflit d’intérêts, de captation de l’action publique par le privé.

Compte-tenu des crises économiques et sanitaires affrontées ces dernières décennies et des enjeux sociaux et climatiques devant nous, quel service public vous semble-il impératif d’ériger ?

Il convient tout d’abord de concevoir le service public comme l’expression d’un effort collectif solidaire. La faveur de la population et le soutien des organisations syndicales représentatives sont indispensables. Il est significatif que le statut général des fonctionnaires de 1983ait été soutenu par l’ensemble des syndicats alors que la loi dite de transformation d’août 2019 a rencontré l’opposition de l’ensemble de ces organisations. D’où l’importance du respect du droit à la négociation qui leur a été reconnu. Il faut ensuite souligner le caractère structurel du service public qui ne peut être soumis aux contingences. Il doit s’adapter en permanence aux évolutions des besoins des populations, au progrès technique et aux changements intervenant dans le contexte national  et international. À cet effet il convient de réformer l’ensemble des grilles de classification des qualifications. La crise sanitaire en a démonté  l’urgence notamment dans les services de santé, d’éducation, de recherche, d’assistance sociale. C’est dans ce nouveau cadre que doivent être traités les problèmes relatifs à l’égalité femmes-hommes, au numérique, aux relations internationales, aux spécificités de la haute fonction publique, etc. Enfin, le service public ne peut s’analyser correctement que dans  une perspective de long terme. Le principe de l’annualité budgétaire ne saurait donc être directeur dans une telle démarche. Autant de défis théoriques, juridiques, professionnels pour la haute fonction publique. »

« Anicet Le Pors, ancien ministre est bien ancré à Plouvien »

par René Monfort

« Ministre de la fonction publique de 1981 à 1984, Anicet Le Pors aime se ressourcer à Plouvien village de son enfance. De la terre des prêtres à la laïcité, il a vécu un parcours original.

Anicet Le Pors, 91 ans et toujours bon pied bon œil, est attaché à la commune de Plouvien où il réside une partie de l’année. Haut fonctionnaire de l’Etat, il est nommé ministre de la fonction publique et des réformes administratives dans le gouvernement de Pierre Mauroy entre 1981 et 1984. Il n’a pas fallu longtemps pour qu’il propose une unification de la fonction publique qui compte aujourd’hui plus de 5 millions de personnes. « Mauroy homme du Nord m’a laissé faire cette proposition. À l’époque on ne pouvait révolutionner le gouvernement car nous n’étions que quatre ministres communistes au gouvernement. » ​Les temps changent et Anicet Le Pors quitte le parti communiste sans changer de philosophie. À la demande de Michel Rocard, il va présider le Haut Conseil à l’Intégration qu’il quittera quand Charles Pasqua est devenu ministre. « Je n’étais pas formé pour être conseiller de Pasqua ! Je suis pour les échanges et la terre appartient à l’ensemble du genre humain. On est fait pour s’entendre., » ​Aujourd’hui, retiré de la vie politique, Anicet Le Pors peut faire le point. « Les grands partis sont morts, c’est le vieux monde qui disparaît. J’ai soutenu Fabien Roussel lors des dernières élections présidentielles, par contre l’écriture inclusive qu’il utilisait dans son programme me gênait profondément. » ​Quand il se retrouve à Plouvien, il se remémore l’histoire de ses parents émigrés à Paris à la recherche d’une vie meilleure. « Je me souviens des journées heureuses au patronage de Plouvien et des séminaristes dynamiques et fraternels qui l’animaient. Pendant la guerre j’ai passé deux ans à l’école et où j’ai rencontré mes meilleurs camarades comme Albert Le Guen. Nous passions nos vacances dans le grenier de Ty -Devet. Depuis mes années d’enfance, sénateur ou ministre, j’ai passé toutes mes vacances à Plouvien. » ​Le parti communiste et Plouvien ne faisaient pas bon ménage. « Un jour nous avions organisé une réunion du parti à Plouvien dans la salle de Catherine Feunteun. Au même moment se déroulait à l’église une cérémonie de pénitence collective. À la fin de la cérémonie, les hommes sont venus dans la salle par curiosité et on a fini à quatre heures du matin avec le commandant de la brigade de gendarmerie de Plabennec ! » ​Anicet Le Pors se souvient aussi du retour de ses parents après 30 ans en région parisienne heureux de retrouver la famille et les amis de jeunesse. Une vie chargée d’histoire et qui a valu à Anicet Le Pors la médaille d’honneur de la commune. »

OUEST FRANCE Dimanche, 14 août 2022

Ernest Pignon-Ernest à Landerneau

Une exposition consacrée à l’oeuvre de Ernest Pignon-Ernest est organisée par le Fonds Hélène Edouard Leclerc pour la culture aux Capucins à Landerneau ( Finistère)

Ci-dessus une peinture murale de l’artiste de 2003 à Alger : Maurice AUDIN

« A l’origine j’ai été invité à participer à une exposition ayant pour thème l’Algérie, (Voyages d’Artistes, commissaire Jean-Louis Pradel).

Dès que j’ai réfléchi au thème que je pourrais traiter à propos de l’Algérie m’est apparu évident que je n’étais pas en situation d’évoquer les drames qui traversent l’Algérie d’aujourd’hui. Nous sommes mal placés pour donner des leçons, même si ces difficultés ne sont pas toutes des séquelles du colonialisme. Très vite j’ai pensé que je devais quelque chose, bien sûr lié à l’Algérie, mais qui pose question à la France d’abord. Si, comme je le souhaite, nous voulons renouer avec le peuple algérien, apaiser nos relations, les enrichir, cela ne pourra pas se faire sur le silence ou le mensonge.

Il faudra obtenir que la vérité soit dite sur ce qu’a été réellement cette guerre. Dans sa singularité tragique, Maurice Audin incarne une exigence de vérité.

Martyrisé, disparu, victime d’un crime toujours non reconnu, non avoué, il nous dit que l’on n’en a toujours pas fini avec « ça ». Avant de me lancer dans ce travail, j’ai rencontré Josette Audin, sa femme. Sans son assentiment, je ne l’aurais pas fait ».

Extrait de l’interview accordée à Mina Kaci dans l’édition du 19 mai 2003 du journal l’Humanité.