Hommage à Marcel Paul – Fédération nationale des Mines et de l’Energie CGT et Institut d’histoire sociale Mines-Énergie CGT – 12 décembre 2012

« Nationalisation. Pôle public de l’Énergie ? »

UNE APPROPRIATION SOCIALE CLAIREMENT ASSUMÉE

Je remercie la Fédération nationale des mines et de l’énergie CGT et son Institut d’histoire de m’associer à cet hommage à Marcel Paul pour le 30e anniversaire de sa disparition. Je me souviens m’être rendu, dès que j’ai appris son décès en 1982, là où il reposait. J’avais alors été responsable à la section économique du PCF des nationalisations et de la politique industrielle, et je continuais de me sentir concerné par la question comme ministre le la Fonction publique et des Réformes administratives. Je pense que le meilleur hommage que l’on puisse rendre à Marcel Paul aujourd’hui est de continuer à discuter de ces questions comme vous le proposez.

*

J’ai beaucoup apprécié les rapports de François Duteil et de Marie Claire Cailletaud, très riches et pleins d’idées. Si j’avais pu en avoir connaissance avant cette intervention j’aurais sans doute été amené à compléter voire à nuancer certains des propos qui vont suivre.

François Duteil m’a assigné comme rôle de « bousculer » le débat. Ce n’est pas mon objectif si ce peut être une conséquence. Je ne veux pas nourrir de faux procès mais je veux dire d’entrée que je suis très réservé sinon hostile à l’idée de « pôle public ».

Tout d’abord, sans vouloir développer une querelle sémantique, je pense le mot inapproprié. Le dictionnaire associe le mot « pôle » au mot « extrémité » et nous dit que les pôles vont par deux : nord-sud, positif-négatif, et sans doute, donc, public-privé.  Si l’on remplace pôle par extrémité on aboutit à des formules absurdes. Si l’on retient la dualité public-privé, cela revient, à côté du pôle public à reconnaître un pôle privé concurrent ; cette institutionnalisation d’un pôle privé n’est peut être pas le meilleur moyen de promouvoir l’intérêt général. De même que le recours à la notion d’ »économie mixte » qui recouvre des contenus très variablesVictor Hugo disait : « La forme c’est du fond qui remonte à la surface ».

Ensuite quel fond justement ? La nationalisation correspond à une volonté de transformation structurelle de la société. Elle se situe sur un terrain éminemment politique du rapport de forces entre catégories et classes sociales. Le pôle, à l’inverse,  en raison de sa large indétermination, se situe essentiellement sur le terrain de la « gouvernance », autre mot à la mode. C’est une régression politique.

Enfin, c’est aussi une régression idéologique. La question de la propriété publique, majeure aussi bien à la Libération que dans les années 1960 à 1980, n’intéresse plus guère comme je peux m’en rendre compte au cours de mes interventions à travers la France. Il faudrait au moins justifier cette désaffection. Ce n’est pas le cas, l’idéologie libérale l’a emporté sur la volonté politique de transformation sociale.

Comme nous sommes dans un Institut d’histoire et que le thème proposé « de la nationalisation au pôle public » nous y invite, je pense en effet qu’il faut, en premier lieu, situer cette réflexion dans une perspective historique. En deuxième lieu  je tenterai de remettre  sur le chantier le concept de propriété publique. En troisième lieu, je m’efforcerai de dégager quelques éléments pour le débat et l’action.

 

I. LES ENSEIGNEMENTS DES NATIONALISATIONS DE 1982

1.1. La nationalisation avant 1982

Le programme du CNR avait appelé à une « organisation rationnelle de l’économie » et proposé « le retour à la nation des grands moyens de production monopolistes, fruit du travail commun, des sources d’énergie, des richesses du sous-sol, des compagnies d’assurance et des grandes banques ». Il préconisait également le soutien aux coopératives de production, d’achats et de entes.

Cette vision n’a pas été remise en cause au cours des deux décennies suivantes et c’est pourquoi la progression de l’union de la gauche dans les années 1960-1970 a fait de la nationalisation l’instrument principal permettant de « changer de cap » – pour le PCF – ou de « changer la vie » – pour le PS. Pour autant, les divergences étaient fortes entre les différentes composantes de la gauche et notamment le PCF et le PS. Le premier était pour un « seuil minimum » de nationalisation – qui n’a cessé de s’élargir au cour de la période d’actualisation du Programme commun de gouvernement – et des nationalisations « franches », c’est-à-dire à 100 %. Le second était pour un ensemble plus restreint et des nationalisations essentiellement « financières », c’est à dire à 51 % de propriété publique du capital afin de s’en assurer le contrôle tout en limitant le montant de l’indemnisation. Personne ne mettait en cause pour autant la nécessité de nationaliser et le PS pouvait proclamer bravement « Là où est la propriété, là est le pouvoir ! ».

1.2. Les nationalisations de 1982

Un Conseil des ministres tenu exceptionnellement à Rambouillet le 2 septembre 1981 opposa sur ces deux lignes de pensée, d’une part Rocard, Badinter et Delors aux ministres communistes, Chevènement et, sans doute, le Premier ministre Pierre Mauroy qui ne prit pas ouvertement parti. C’est avec une certaine surprise que nous vîmes François Mitterrand arbitrer en faveur d’un champ de nationalisation relativement large dont plusieurs groupes nationalisés de manière « franche » et la plus grande partie du secteur bancaire. Après un passage devant le Conseil constitutionnel et un ajustement pour indemnisation insuffisante, la loi du 11 février 1982 consacra ces nationalisations[1].

Les transferts juridiques de propriété furent correctement réalisés. Pour autant ces nationalisations furent un échec sur lequel il convient de s’interroger pour en tirer les enseignements. La première cause me semble résider dans le « tournant libéral » adopté par le gouvernement et le Président de la République en mai 1983 – précédé du blocage des salaires et des prix de juin à novembre 1982 – qui privait le secteur public de ses finalités économiques, spécialement celles d’une politique industrielle volontariste puisque dorénavant c’était la « main invisible » du marché qui dictait sa loi. La seconde cause est que les travailleurs de ces entreprises – et plus largement l’ensemble des salariés – ne se sont pas sentis concernés par ces nationalisations dans la mesure où les quatre lois Auroux se sont étalées de 1982 à 1984, soit après l’ « état e grâce » – bien que passées au Conseil des ministres du 25 mars 1982 – et que la loi de démocratisation du secteur public n’a été promulguée que le 26 juillet 1983, soit après le « tournant libéral »[2].

1.3. La régression postérieure de l’idée de nationalisation

Il s’en est suivi une désaffection vis-à-vis de l’idée même de nationalisation, assez naturelle pour ceux qui, à gauche, ne l’avaient admise qu’avec réticences, renforcée par l’effondrement du camp du « socialisme réel » qui a fait craindre à certains des principaux partisans des nationalisations d’être taxés d’ « étatistes soviétique », provoquant leur repentance. Il ne faut pas s’étonner dans ces conditions des vagues de privatisations qui ont suivi, principalement réalisées sous des gouvernement de gauche – changements de statut de La Poste et de France Télécoms en 1990, réduction du capital public d’Air France en 1998, par exemples -. Ce qui a permis au journal Le Monde de titrer un article « Lionel Jospin privatisé plus que Alain Juppé »[3]. J’y vois aussi la raison pour laquelle on ne parle pratiquement plus aujourd’hui de nationalisations mais de pôles publics.

 

II. UNE NOUVELLE GENERATION DE LA PROPRIETE PUBLIQUE

 2.1. Actualité de la propriété publique

La propriété est un pouvoir sur les choses et par là sur les hommes. Son importance n’a pas diminué : la lecture de la presse quotidienne montre que les dirigeants des grands groupes industriels et financiers s’intéressent aux mouvements du capital. Ce n’est malheureusement plus le cas des forces de la transformation sociale qui ont aussi abandonné toute réflexion approfondie sur la question de l’État, des institutions, en dépit du démantèlement de l’ « administration rationalisante » – Commissariat général du Plan, Conseil national d’évaluation, Haut conseil des entreprises publiques, etc).

Ce laisser-aller idéologique est d’autant plus regrettable que notre époque est marquée par le développement des interdépendances mondiales, des exigences de solidarité internationales. Le XXIe siècle pourrait être l’ « âge d’or » des services publics, entrainant la nécessité de définir le « patrimoine commun de l’humanité ». Les raisons qui justifient un secteur public étendu en France sont de trois ordres.

D’abord politique. Il s’agit de faire pièce à la domination du capital, d’assurer la cohésion sociale et de créer les meilleures conditions d’une citoyenneté affranchie des différentes formes d’aliénation.

Ensuite économique. Car seule la propriété publique permet de développer des stratégies pluriannuelles, d’impulser un volontarisme d’ordre public dans l’administration des choses, de prendre correctement en compte les externalités.

Enfin sociale et culturelle. La propriété publique concourt à la « démarchandisation » des rapports sociaux. Le secteur public a permis l’élaboration de statuts des personnels dont les bases législative et réglementaire prennent le contre-pied des relations contractuelles inégales du secteur privé.

2.2. Les trois générations de propriété publique

La propriété est un terme générique qui recouvre en réalité une généalogie de formes et de contenus de complexité croissante. Trois générations peuvent être distinguées.

Première génération. La propriété individuelle a été reconnue comme un « droit inviolable et sacré » du citoyen par l’article 17 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, qui lui a cependant fixé une limite : « la nécessité publique, légalement constatée »[4], disposition reprise sous l’expression d’« utilité publique » par l’article 545 de l’actuel code civil[5]. Dès l’article premier de la déclaration des droits il est question d’ « utilité commune »[6]. La notion de propriété publique n’est donc pas absente de la déclaration des droits de 1789.

Deuxième génération. Suite à l’accumulation monopoliste du capital et à la mondée de mise en œuvre de services publics, la propriété publique a consacré une socialisation plus poussée des bases économiques et l’affirmation de la spécificité de l’intérêt général. Cela a conduit le point 9 du Préambule de la constitution de 1946 à disposer que « 9. Tout bien, toute entreprise, dont l’exploitation a ou acquiert les caractères d’un service public national ou d’un monopole de fait, doit devenir la propriété de la collectivité. » D’importantes nationalisations, comme nous l’avons dit, ont été réalisées sur ces bases.

 Ces dispositions ont été explicitées en 1972 dans le cadre de l’élaboration du Programme commun de gouvernement. Il prévoyait, dans sa version originale[7], la nationalisation de l’ensemble du secteur bancaire et financier et, dans l’industrie, celle des groupes et entreprises répondant à quatre critères : entreprises répondant à des besoins fondamentaux et ayant un caractère de service public, celles vivant sur fonds publics, les principaux centre d’accumulation capitalistes, les entreprises contrôlant des branches essentielles. Cette problématique débouchait sur une liste concrète d’établissements et de sociétés nationalisés totalement ou partiellement. Elle demeurait toutefois  dans le même esprit que celui du préambule de 1946.

Existe dès lors la tentation de considérer que, puisque la nationalisation dans cette conception n’a pas été suffisante en 1982, c’est qu’elle n’est pas nécessaire. D’où les concepts de substitution : économie mixte, délégation de service public, la gouvernance, le new public management le pôle public, etc. ce qui revient à donner la préférence à la gestion sur le pouvoir, à renoncer aux stratégies publiques, à figer le concept de propriété publique dans une acception purement juridique.

Troisième génération. Elle correspond à une complexité croissante et découle du diagnostic que l’on peut faire de l’expérience de 1982. Ce qui a manqué alors – outre le débat que l’on peut entretenir sur le champ du secteur public et sa nature – c’est, comme nous l’avons vu, deux choses : d’une part, une légitimation insuffisante – et rapidement obsolète – par des finalités volontaristes de politique économique ; d’autre part, un intéressement défectueux des travailleurs des entreprises concernées et plus généralement de l’ensemble des salariés et de la population. Pourtant, ce n’est pas dans la dénaturation du concept de propriété publique que se trouve la solution, mais au contraire dans son approfondissement à la lumière de l’expérience. On peut alors, soit maintenir le concept sous son vocable de propriété publique, soit si l’on veut souligner l’évolution, parler  d’« appropriation sociale », comme je l’ai fait dans une brochure réalisée – en collaboration – sous l’égide de la fondation Copernic en 2002, et à laquelle on pourra se reporter[8].

2.3.  La notion d’appropriation sociale

L’appropriation sociale est fondée sur l’idée de maîtrise. Celle-ci suppose nécessairement un transfert de propriété parfaitement identifié : quelles nationalisations ? sous quelle forme ? quelles associations de secteurs publics internationaux ? quelles propriétés publiques au niveau mondial ? D’autres instruments de maîtrises peuvent être associés à la propriété publique : des formes mutuelles, coopératives ou associatives. D’autres droits réels peuvent être conçus.

La stratégie de maîtrise suppose aussi une analyse pertinente des relations internationales et géopolitiques susceptibles de garantir aussi bien la souveraineté nationale – qui ne saurait exclure des mesures de protection – que les transferts éventuels de compétences, les modalités de la coopération internationale. La prospective scientifique et technique est une autre dimension de la maîtrise ; elle est indispensable pour assurer l’adaptabilité du service public et, par là, sa continuité ; c’est une dimension essentielle de l’indépendance nationale. La planification est nécessaire pour prendre les décisions de moyen et long terme permettant une satisfaction des besoins, le débat démocratique à leur sujet, l’intervention des travailleurs dans la réalisation d’objectifs définis démocratiquement.

Cela dit, avec le même contenu on peut conserver les expressions : propriété publique, secteur public, fonction publique et … nationalisation.

 

III. L’APPROPRIATION SOCIALE AUJOURD’HUI

 Je n’aurai pas la prétention de dire quelle traduction du concept d’appropriation sociale il convient de faire dans le secteur public de l’énergie. Cela serait contradictoire avec les énoncés précédents : ampleur des études à entreprendre, stratégie à définir, intervention des travailleurs du secteur à envisager. Je me bornerai donc à quelques indications  dans les trois volets de l’appropriation sociale que j’ai retenus : le champ du secteur public, l’économie des besoins, le statut des travailleurs. Pour y réfléchir, j’ai néanmoins pris connaissance de deux documents : l’un, très long, de janvier 2011, intitulé « Politique énergétique : les positions de la FNME-CGT ; l’autre, plus court et plus récent exposant les « repères revendicatifs de la CGT (adoptés par le CCN des 8 et 9 novembre 2011 » sous le titre « pôle public »

3.1. Le champ juridique de l’appropriation sociale

Le document du CCN évoque en réalité la création de « pôles publics – au pluriel – dans différents secteurs ». Le texte évoque, en effet, un pôle public de l’énergie et un pôle public financier, mais sans décrire ni l’un ni l’autre.

S’agissant du pôle public de l’énergie, l’importance du secteur public déjà existant explique peut être que le champ en soit déjà connu pour l’essentiel, mais ce n’est pas si évident. Peut être faudrait-il être plus précis et procéder autrement : en disant, par exemple, ce qui ne fait pas partie du pôle public.

En  ce qui concerne le pôle financier public, son contenu est indéterminé dans le texte précité. Ayant souvent posé la question de sa consistance, les réponses les plus précises que j’ai pu obtenir font état de la Caisse des dépôts et consignations, du Crédit foncier, d’OSEO et de la Banque postale, tous déjà organismes publics. On y ajoute parfois, sans plus de précision : des banques et assurances mutualistes et, in fine, des nationalisations – non identifiées – de banques et d’assurances. Le tout « mis en réseau » et faisant l’objet d’une « gouvernance ». Significatif est ici le recours au vocabulaire de l’idéologie managériale.

Quant au document de la fédération, il se fonde sur un « mixte » les ressources énergétiques, mais aussi des entreprises, qu’elles soient publiques ou privées.  Le pôle est « pensé comme organisation du secteur et non comme décision de propriété publique. Le pôle public c’est la maîtrise par la nation ce qui n’implique pas nécessairement la nationalisation mais la mise en cohérence technique et de gestion » (p. 10). C’est clair sur le fond, sans qu’on sache pour autant quelle est la configuration du pôle qui n’appelle aucune autre nationalisation à court terme.

Il reste donc beaucoup de travail pour savoir de quoi le pôle public de l’énergie – le cas échéant, le pôle public financier – est le nom. La notion d’ « économie mixte » est une échappatoire. Cela dit, comme la notion de « classe sociale », les statuts des entreprises se sont diversifiés et cette complexification du rapport public-privé n’est sans doute pas pour rien dans la vogue de la notion de « pôle public » qui recouvre cette complexité mais sans justifier son utilité.

3.2. Une économie des besoins[9]

En revanche, l’approche par l’économie des besoins me semble mieux prise en compte par les documents précités. Dans le document du CCN, est affirmé le droit à l’énergie, à l’environnement ; la nécessaire solidarité Nord-Sud. Cinq « dimensions » du pôle public sont évoquées à cet égard :

  1.  Réglementer ne suffit pas, il faut une intervention directe d’un «  secteur public important » pour utiliser un savoir-faire reconnu.
  2.  Discipliner les entreprises privées et les responsabiliser en vue d’objectifs d’intérêt général.
  3.  Assurer un financement suffisant des besoins économiques et sociaux collectifs.
  4.  Introduire la question de la place des intérêts publics et collectifs dans le débat européen.
  5.  Enfin, la question de la démocratie et de la réappropriation citoyenne des enjeux précédents.

La document de la fédération énumère, lui, douze points de caractère plus technique

Il s’agit là d’un effort incontestable d’analyse et de formalisation des finalités du secteur public de l’énergie. Mais on ne peut s’empêcher de poser la question : mais encore au regard des interrogations aujourd’hui dans l’opinion publique?

Les nationalisations de la Libération ont été réalisées sur la base du double principe de monopole et de spécialisation. Dans les années 1970, le Conseil d’État a admis pour les entreprises publiques du secteur de l’énergie une « marge admissible de diversification », autorisant, par exemple, EDF à faire de l’ingénierie au Bangladesh. Quelle perspective doit-on donner à cette diversification, tandis que le document de la fédération m’a semblé préconiser le maintien d’un monopole par catégories de ressources ?

N’étant pas spécialiste du secteur, je ne peux que soulever quelques questions « dans l’air du temps » dont je me demande si elles sont pertinentes : la transition énergétique, les énergies renouvelables, l’intervention des collectivités territoriales, le contenu – notamment financier de la loi de programmation prévue pour juillet 2013. Si ces questions se posent réellement, alors on ne peut se contenter de généralités.

3.3. La question statutaire

L’intervention des travailleurs dans la gestion des entreprises, l’exercice d’une pleine citoyenneté sur les lieux de travail, la défense des droits et la promotion des droits nouveaux sont des questions générales qui appellent des réponses précises mais dont l’examen dépasse le cadre de cette intervention. Les deux documents précités ne manquent pas d’ailleurs de faire de nombreuses propositions de démocratisation des entreprises et de promotion des droits des travailleurs du secteur.

Je voudrais, en conséquence, limiter mon propos à la question statutaire. La France présente cette exception d’avoir le quart de sa population active régis par des statuts, un cinquième dans des fonctions publiques. Il s’agit essentiellement des 5,4 millions de fonctionnaires de l’État, des collectivités territoriales, des établissements publics hospitaliers et de recherche régis par leur statut général, auxquels il convient d’ajouter les personnels à statuts des entreprises et organismes publics pour environ un million. Dans le contexte d’ultralibéralisme actuel, n’y aurait-il rien à dire sur la situation très particulière de ces personnels régis par la loi et le règlement et non par des contrats et si souvent dénigrés ? Je ne partage pas le point de vue de tels dirigeant syndical cégétiste de la fonction publique qui considère que ce n’est pas la notion de statut qui est importante mais le contenu et qui estime, qu’en somme, le statut général des fonctionnaire n’est rien d’autre que la « convention collective des fonctionnaires » !

Lors de son dernier congrès confédéral, la CGT a retenu comme l’une de ses revendications majeures le « statut du travail salarié ». Je me suis interrogé alors sur la signification de cette formulation, jusqu’à la parution en juin 2009 d’un numéro du Peuple entièrement consacré à un Nouveau statut du travail salarié[10]. J’ai cru alors comprendre qu’il s’agissait d’aborder de façon globale la condition salariale en réduisant la différence entre salariés du secteur privés et salariés du secteur public, ce qui n’était pas critiquable de mon point de vue. Ce qui l’était davantage c’était de considérer que cela devait se faire essentiellement par une amélioration des conventions collectives, dans laquelle les statuts du secteur public seraient regardés comme des conventions collectives particulières.

Je ne saurais, pour ma part, souscrire à une telle analyse si elles se trouvait confirmée. Je suis favorable à un rapprochement des conditions de travail et de vie de l’ensemble des salariés, qu’ils soient du public ou du privé, mais dans le sens d’un renforcement des garanties législatives et réglementaires et non dans la seule perspective d’amélioration des conventions collectives qui sont, principalement, de caractère contractuel. C’est pourquoi je préfère parler de Statut des travailleurs salariés du secteur privé, permettant notamment la sécurisation des parcours professionnels par la loi, de nature à favoriser la convergence « vers le haut » de l’action des travailleurs des secteurs public et privé. C’est ce que j’ai développé dans un article de la revue du Droit du travail[11]. J’espère que le prochain congrès confédéral opèrera un changement d’optique sur cette question qui revient à revendiquer une amélioration d’ensemble des salariés dans le respect de la spécificité du secteur public qui est le service de l’intérêt général. Cela aussi fait partie de l’appropriation sociale.

En conclusion, je persiste à penser que la notion de « pôle public » recouvre une volonté de passer de la propriété publique à la gestion ; que l’économie des besoins qui devrait finaliser la propriété publique est incertaine ; que l’application  de la notion de « nouveau statut du travail salarié » aux entreprises publiques à statuts et à la fonction publique et son statut général des fonctionnaires est néfaste. L’ensemble – au demeurant cohérent – constitue, à mes yeux, une démarche préoccupante.

Sans doute est-il particulièrement difficile, dans une situation de décomposition sociale profonde, de relier le travail syndical classique et l’ouverture de perspectives dans une société qui a perdu ses repères[12]. Mais ce n’est pas une situation nouvelle, si elle peut apparaître plus angoissante aujourd’hui. C’est aussi une société de transition entre un XXe siècle « prométhéen » et un XXIe siècle que nous avons du mal à imaginer faute d’une théorisation satisfaisante. Cette période est aussi une période riche en contradictions, où le nouveau le dispute à l’ancien, et qui doit nourrir un optimisme raisonné dans l’action revendicative quotidienne : « Travailleurs, n’ayez pas peur ! »


[1] Sont nationalisés les groupes industriels suivants : Thomson, Saint-Gobain, Usinor et Sacilor, Ugine Kuhlman, Suez ; une quarantaine de banques et holdings financiers. L’indemnisation s’est élevée à 39 milliards de francs. En 1983, un salarié sur quatre travaille dans le secteur public.

[2] Dans la fonction publique, plusieurs décrets du 28 mai 1982 ont amélioré les compétences des organismes paritaires (commissions administratives paritaires, comités techniques paritaires, comités d’hygiène et de sécurité, conseil supérieur de la fonction publique, droit syndical). Le statut général des fonctionnaires a fait l’objet de quatre lois : droits et obligations des fonctionnaires (loi du 13 juillet 1983, fonction publique de l’État (loi du 11 janvier 1984), fonction publique territoriale (loi du 26 janvier 1984), fonction publique hospitalière (loi  du 9 janvier 1986). À l’occasion du passage en conseil des ministres de ce dernier projet de loi, François Mitterrand dira son regret d’avoir autorisé ces quatre lois.

[3] Le Monde, 17 août 1998.

[4] « Art. 17. La propriété étant un droit inviolable et sacré, nul ne peut en être privé, si ce n’est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l’exige évidemment, et sous la condition d’une juste et préalable indemnité. »

[5] Art. 545 du code civil : « Nul ne peut être contraint de céder sa propriété, si ce n’est pour cause d’utilité publique, et moyennant une juste et préalable indemnité. »

[6]  Art. 1er . « Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits. Les distinctions sociales ne peuvent être fondées que sur l’utilité commune. »

[7] Programme commun de gouvernement, Éditions sociales, 1972, p. 113-116.

[8] L’appropriation sociale (en collaboration), Éditions Syllepse et Fondation Copernic, 2002.

[9] Pour une réflexion générale sur l’économie des besoins, voir Jacques Fournier, L’économie des besoins, Éditions Odile Jacob, 2013.

[10] Nouveau statut du travail salarié, Le Peuple, n° 1685, 17 juin 2009. Pour une vision générale des questions de la fonction publique voir le blog de René Bidouze  : http://renebidouze.over-blog.fr/(colonne de gauche du présent blog).

[11] A. Le Pors, Pour un statut des travailleurs salariés du secteur privé, Droit du travail, Dalloz, n° 3, mars 2010.

[12] Voir A. Le Pors, Pendant la mue le serpent est aveugle, Albin Michel, 1993.

l’Etat et la question des institutions – PCF Bassin d’Arcachon – 8 décembre 2012

Quelle était la première revendication dans les cahiers de doléances présentés le 5 mai 1789 lors de la réunion des États généraux du 5 mai 1789 ? C’était l’exigence de doter la France d’une constitution écrite. C’était l’aboutissement d’un long processus marqué par une sécularisation croissante du pouvoir politique (Philippe le Bel, François 1er, Louis XIV), puis une émancipation de l’État de la personne du monarque (Montesquieu, J-J. Rousseau), puis une bipolarisation État-citoyen (déclaration des droits ou préambule – constitution).

Après la Révolution française, la question institutionnelle est demeurée une donnée permanente de la vie politique française : la France est un véritable laboratoire institutionnel, 15 constitutions en deux siècles. Elle présente deux modèles antagoniques : l’un démocratique avec la constitution du 24 juin 1793, l’autre autoritaire avec la loi de Louis-Napoléon Bonaparte du 14 janvier 1852.

 

 I. ENSEIGNEMENTS SUR LA QUESTION INSTITUTIONNELLE DEPUIS LA DEUXIEME GUERRE MONDIALE

 1.1. La Constitution de la IVème République

À la Libération, personne ne voulait revenir à la IIIe République. Le PCF influent avait comme référence la constitution de 1793, le général de Gaulle inclinait en faveur du modèle des États Unis. Un premier référendum le 24 octobre 1945 ouvre la voie à l’élaboration constitutionnelle, mais de Gaulle démissionne le 20 janvier 1946. Un premier projet est rejeté par référendum  le 5 mai mais un second approuvé le 27 octobre 1946. Le PCF dépasse le quart des voix aux élections. Le général de Gaulle prononce son discours de Bayeux en faveur du régime présidentiel ?

Il s’agit d’un régime parlementaire. Un important préambule pose des principes ; il est toujours en vigueur. Sont évoqués Et évoqués les « principes fondamentaux reconnus par les lois de la République ». Le Parlement est composé de l’Assemblée nationale (élue à la proportionnelle, modifiée en 1951 par la loi sur les apparentements) et le Conseil de la République. Le rôle du Parlement est décisif pour l’élaboration de la loi, l’élection du Président de la République, pour la formation du Gouvernement qu’il doit investir après la désignation du Premier ministre par le Président. Il y eut 25 gouvernements en douze ans. Le professeur J-J Chevallier a caractérisé une constitution « rationnelle mais pas raisonnable ».

La IVème  République est tombée en raison des difficultés économiques de la reconstruction, les guerres d’indépendance d’Indochine et d’Algérie et la décolonisation, de la dénaturation du régime parlementaire, des évènements (guerre d’Égypte et détournement de l’avion de Ben Bella, finalement l’émeute du 13 mai à Alger. Le président de la République René Coty fait appel au général de Gaulle et l’autorise à élaborer une nouvelle constitution.

1.2. La Constitution de la Vème République

La loi du 3 juin 1958 fixera le cadre institutionnel du projet, mais de Gaulle y formalisera son projet de Bayeux, modéré par Michel Debré, Premier ministre, en faveur d’un « parlementarisme rationalisé ». Le projet est adopté par référendum du 28 septembre. Seul le PCF en temps que parti s’oppose au projet adopté par 80 % des votants. Le vote concerne l’indépendance pour les pays coloniaux (Guinée).

Domination du Président de la République, élu et rééligible pour 7 ans par un collège de grands électeurs. Pouvoirs considérables : nomination du Premier ministre et du Gouvernement, pouvoirs considérables des l’art. 16 et 11.

Le Gouvernement détermine et conduit la politique de la nation. Il a l’initiative des lois, le Premier ministre peut proposer un référendum, dispose du pouvoir réglementaire sur la base des art.34 et 37. Il peut légiférer par ordonnance, poser la question de confiance.

Le Parlement (Assemblée nationale et Sénat), élus selon des lois ordinaires. Rationalisé en tant que les présidents sont élus de manière irréversible, que sa consultation est obligatoire dans certains cas, que le Conseil constitutionnel peut être saisi. Ses pouvoirs sont réduits.

La constitution a fait l’objet de 24 modifications (dont 19 depuis 192). Les principales sont :

– 1962 : l’élection du Président de la République au suffrage universel direct.

– 1974 : la réforme du Conseil Constitutionnel.

– 2000 : le quinquennat.

– 2003 : loi constitutionnelle relative à l’organisation décentralisée de la République

– 2008 : ratification du traité de Lisbonne

– 2008 : Loi constitutionnelle du 23 juillet sur la réforme des institutions, prévoyant notamment la possibilité de référendum parlementaro-populaire, la question prioritaire de constitutionnalité …

Dans cette évolution on peut distinguer trois phase : le parlementarisme rationalisé, la monarchie aléatoire[1], la dérive bonapartiste. Et maintenant ?

 

II.  LE CONTEXTE ACTUEL DE LA QUESTION INSTITUTIONNELLE

Les institutions sont une représentation par une société de son modèle d’organisation des pouvoirs. On peut distinguer les institutions idéales des institutions possibles. Elles dépendent aujourd’hui d’une situation de décomposition sociale et d’un affaissement idéologique sur la question.

2.1. Une situation de  décomposition sociale

Les symptômes en sont multiples (abstentions-diminution des mouvements revendicatifs,  montée des sectes-jeux de hasard, p. ex.). On peut en identifier des causes : relativisation des États-nations, complexification de la notion de classe, bouleversements spatiaux, évolution des mœurs, affaissement des idéologies messianiques.

Plusieurs écrits  en témoignent : Alfred de Musset (Confession d’un enfant du siècle, 1836, « On ne sais, à chaque pas qu’on fait si on marche sur un débris ou sur une semence »), Anicet le Pors (« Pendant la mue le serpent est aveugle » 1993 ; « Éloge de l’échec », 1999), Edgar Morin et la « métamorphose », Alain Badiou qui pose « Qu’appelle-t-on échouer ? » dans « L’hypothèse communiste ».

La question posée est aujourd’hui : de quel instrument politique institutionnel avons nous besoin à l’issue d’un cycle « prométhéen », marqué sur la période par un  cycle trentenaire d’économie administrée (planification à la française), puis d’un autre d’ultralibéralisme qui s’achève par la crise et appelle le retour de l’État et pose la question des services publics et des institutions.

2.2. Des projets contestables

La banalisation sarkozyste

Marcel Gauchet a écrit : « Le programme initial du sarkozysme, c’est un programme de banalisation de la France ». Il s’est agi en effet d’un « pragmatisme destructeur » d’anomalies : laïcité, service public, asile, intégration, collectivités territoriales. Ouverture d’un contrefeu avec la campagne sur l’identité française. Cela était de nature à provoquer une double déstabilisation : par la décentralisation envisagée et la mondialisation encouragée.

Au plan institutionnel, ancien Président de la République a contourné l’opposition populaire traduite par le rejet du projet constitutionnel européen en le faisant adopter sous forme du traité de Lisbonne par le Parlement en 2008. On lui doit également l’importante réforme institutionnelle de la loi du 23 juillet 2008 dont les principales dispositions sont : limitation à deux le nombre de mandats consécutifs du Président de la République ; possibilité pour un cinquième des membres du Parlement, soutenus par un dixième des électeurs inscrits, de demander la tenue d’un référendum sur l’un des sujets prévus dans l’article 11 ; le président de la République peut convoquer le Congrès du Parlement français pour faire une déclaration ; les parlementaires sont remplacés temporairement en cas d’acceptation par eux de fonctions gouvernementales ; la discussion des projets et propositions de loi ne porte plus devant la première assemblée saisie sur le texte présenté par le gouvernement, mais sur le texte adopté par la commission saisie, sauf pour les projets de révision constitutionnelle, les projets de loi de finances et les projets de loi de financement de la sécurité sociale ; les assemblées fixent maintenant elles-mêmes leur ordre du jour indépendamment du Gouvernement. celui-ci conserve néanmoins certaines prérogatives importantes ; les justiciables ont désormais la possibilité, depuis mars 2010, de contester la constitutionnalité d’une mesure qui leur est opposée, créant ainsi la possibilité de révision constitutionnelle a posteriori (QPC) ; le Conseil économique et social devient le Conseil économique, social et environnemental ; le Défenseur des droits est créé ; les langues régionales appartiennent au patrimoine de la France.

Le rapport Jospin consacre la Ve République

Il ne semble pas que le pouvoir actuel soit en mesure de répondre à la nécessité d’une réforme institutionnelle profonde sur la base du rapport Jospin. Rappelons préalablement que l’on doit à l’ancien Premier ministre une vague de privatisation supérieure à celle réalisée par Alain Juppé ainsi que la réforme du quinquennat accompagnée de l’inversion du calendrier faisant précéder les élections législatives des présidentielles.

Les mesures proposées par celui-ci ne modifient pas le caractère de la Ve République. L’élection du ¨résident de la République au suffrage universel est maintenue avec seulement le remplacement du parrainage des candidatures de 500 élus par 150 000 électeurs dans 50 département, le scrutin majoritaire uninominal à deux tour des députés est inchangé sinon l’élection de 10 % des députés à la proportionnelle nationale. La composition du Sénat serait rééquilibrée au profit des départements et des régions avec plu  d’élus à la proportionnelle. Le cumul des mandats serait réduit. Le chef de l’État pourrait être jugé au civil comme au pénal pour faits hors mandat, non dans l’exercice de ses fonctions.

Une VIème République ?

L’idée la plus simple est d’opposer aux institutions actuelles une autre construction institutionnelle. C’est ce que j’avais proposé à l’occasion du bicentenaire de la Révolution française sous forme d’un projet constitutionnel complet[2]. Celui-ci, une fois adopté a été aussitôt oublié.

Pour autant, je ne suis pas partisan aujourd’hui d’une VIe République pour les raisons suivantes. D’abord, parce qu’il s’agit d’une facilité qui, le plus souvent, dispense d’une réponse sérieuse au fond. Réclamée d’Olivier Besancenot à Marine Le Pen en passant par Pierre Laurent, Jean-Luc Mélenchon et Cécile Dufflot, on espère qu’il ne s’agit pas de la même VIè  République. Ensuite, parce que les projets présentés sont le plus souvent formulés de manière sommaire et peu cohérente. L’exemple le plus frappant de cette vanité confuse est le projet de VIe   République dont Arnaud Montebourg avait fait un fonds de commerce et qui, à l’examen, de contours en concession, se révèle n’être rien d’autre qu’une Ve  République-bis. Enfin, il existe une autre raison qui fait de la VIe  République une revendication illusoire : aucune des cinq républiques qui ont marqué notre histoire récente n’est née d’une gestation spéculative. La Convention déclare le 21 septembre 1792 : « La royauté est abolie en France » et un décret du 25 septembre proclame : « La République est une et indivisible » ; ainsi est née la première République parachevant la Révolution française. La deuxième est issue des émeutes de février 1848 aboutissant à l’abdication de Louis-Philippe  et à la  constitution républicaine du 4 novembre 1848 ; elle sera, on le sait et l’on doit s’en souvenir, balayée par le coup d’État du 2 décembre 1851 et le référendum-plébiscite de Louis-Napoléon Bonaparte des 21 et 22 décembre. La troisième émerge à une voix de majorité de la confrontation des monarchistes et des républicains moins de quatre ans après l’écrasement de la Commune de Paris et la défaite du Second Empire à Sedan. La quatrième est issue de la seconde guerre mondiale, de l’écrasement du nazisme et de la résistance, promulguée le 27 octobre 1946. La cinquième voit le jour par le référendum du 28 septembre 1958, portée par le putsch d’Alger dans un contexte de guerre coloniale. S’il y a bien crise sociale aujourd’hui, qui oserait soutenir qu’elle s’exprime au niveau des évènements qui viennent d’être évoqués ? Jamais en France on a changé de république sans événement dramatique. Dans une société en décomposition sociale profonde, il manque encore l’ « Événement ».

La même argumentation pourrait être opposée aux partisans d’une Constituante. Toutes les constituantes sont survenues après des évènements majeurs et sur les décombres de l’ordre précédent. Ce n’est pas la situation actuelle et une telle proposition permet de ne rien dire du contenu ; c’est un mot-valise. C’est encore une facilité doublée d’ un risque : une constituante élue aujourd’hui serait dominée par une écrasante majorité PS-UMP. L’important et le préalable est donc le contenu.

 

III. LA QUESTION DES INSTITUTIONS AUJOURD’HUI

3.1. La souveraineté

Jean-Jacques Rousseau s’efforçait de définir ainsi les citoyens dans le Contrat social : « À l’égard des sociétés, ils prennent collectivement le nom de Peuple, et s’appellent en particulier citoyens comme participant à l’autorité souveraine ». Il annonçait ainsi le transfert de la notion de souveraineté du monarque au peuple. La nation sera introduite par l’article 2 de la Déclaration des droits de 1789 : « Le principe de toute souveraineté réside essentiellement dans la nation ». La constitution de 1793 ajoutera en son article 7 : « Le peuple souverain est l’universalité des citoyens français ». La constitution de la IVe   République retiendra la notion de souveraineté nationale  que l’on retrouve dans  la constitution de la Ve République en son article 3 : « La souveraineté nationale appartient au peuple qui l’exerce par ses représentants et la voie du référendum ».

La souveraineté est une en ce qu’elle légitime l’exercice du pouvoir politique et de ses instruments (création monétaire, État de droit, politiques publiques, relations internationales).  Il est courant d’en distinguer deux aspects, la souveraineté nationale et la souveraineté populaire. La première ne prétend pas à la seule représentation des citoyens existants, mais veut aussi traduire les aspirations de la continuité des générations. La seconde tend à privilégier la démocratie directe par rapport à la démocratie représentative soutenue par la première. La souveraineté ne saurait être déléguée si certaines compétences peuvent l’être. C’est dans le contexte très particulier du lendemain de la deuxième guerre mondiale que le préambule de la constitution de 1946 a prévu que, sous réserve de réciprocité, « La France consent aux limitations de souveraineté nécessaires à l’organisation et à la défense de la paix. ». Restera constante, par ailleurs, la règle selon laquelle « Les traités ou accords régulièrement ratifiés ou approuvés ont, dès leur publication, une autorité supérieure à celle des lois » (article 55 de la constitution).

La souveraineté ne saurait cependant être préservée par le seul respect formel des règles du droit positif.  On a vu comment le Gouvernement a pu contourner le rejet par le peuple français  du traité sur la constitution européenne en mai 2005, pour faire ratifier ensuite le traité de Lisbonne par le Parlement. Et puis la souveraineté c’est aussi la maîtrise des bases économiques nationales, gravement mise en cause par le Traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance au sein de l’union économique et monétaire récemment ratifié par le Parlement. La nation est et demeure le niveau le plus pertinent d’articulation du particulier et du général.

3.2. La démocratie directe

L’intervention du peuple ne saurait faire l’objet d’une réglementation excessive. La démocratie directe c’est d’abord le plein exercice des droits et des libertés existants. C’est aussi le fortuit, l’incodifiable, l’initiative, l’épopée, le talent. Il serait vain et quelque peu totalitaire de prétendre en tout point réglementer la vie, non seulement privée mais aussi publique. Pour autant, la souveraineté nationale et la souveraineté populaire doivent pouvoir être traduites partiellement dans des règles de droit, si celles qui existent n’épuisent pas le sujet.

Des progrès peuvent être réalisés. On en donnera deux exemples. Le premier consisterait à accroître la portée du droit de pétition. Une question rédigée qui aurait réuni un certain pourcentage de signatures d’électeurs inscrits pourrait faire obligation à l’assemblée délibérante compétente d’en débattre et de prendre position. Cette décision pourrait ensuite, en cas d’approbation, conduire à l’élaboration des règles administratives, réglementaires ou législatives correspondantes. Le rejet du texte devrait être motivé et le débat se poursuivrait éventuellement dans l’opinion publique – la réforme constitutionnelle du 23 juillet 2008 amorce le mouvement en ce sens -. Le second reviendrait, sous certaines conditions, à donner l’initiative des lois au peuple. Là encore un minimum de soutiens seraient exigés sur une proposition de loi entièrement formulée. Après quoi le texte pourrait être inséré dans une procédure parlementaire et devenir une loi au terme du processus qui pourrait faire intervenir des instances déconcentrées ou décentralisées. Ce ne serait à vrai dire pas une véritable novation : la Constitution de l’An I, pourtant réputée jacobine, prévoyait déjà l’intervention des communes et des assemblées primaires des départements dans l’élaboration de la loi[3].

C’est cependant le référendum qui constitue en matière de démocratie directe la question la plus délicate. En reconnaissant à tous les citoyens le droit de concourir personnellement à l’expression de la volonté générale et à la formation de la loi, la Déclaration des droits de 1789 (art. 6) ouvrait la voie aux consultations référendaires et à la mise en mouvement politique du peuple. Mais on a vite pressenti les dangers du référendum et les risques qu’il pouvait faire courir à la démocratie dans les mains d’un pouvoir autoritaire relevant de la ligne de force césarienne évoquée plus haut. Olivier Duhamel le souligne : « le référendum peut être liberticide : les Bonaparte en ont apporté la preuve »[4]. La Constitution de 1793 prévoyait que le peuple pouvait délibérer sur les lois proposées par le corps législatif. La Constitution de 1946 ne retenait le référendum qu’en matière constitutionnelle. La Constitution de 1958 le prévoit en deux dispositions : en matière d’organisation des pouvoirs publics, de réformes relatives à la politique économique ou sociale, de ratification des traités – art. 11, dont le champ a été élargi en 1995 – et en matière constitutionnelle (art. 89). Par ailleurs, la loi du 6 février 1992 a institué un « référendum communal » ; il est de faible portée.

Bien que les référendums sur le traité de Maastricht en 1992 et celui sur le récent projet de « traité établissant une constitution pour l’Europe », mis en échec le 29 mai 2005, aient été l’occasion de débats importants, il reste que, depuis 1793, seulement 3  référendums sur 24 ont dit « non » à ceux qui les ont organisés.

Le recours au référendum relève ainsi le plus souvent d’un pouvoir exécutif autoritaire à tendance plébiscitaire. Corrélativement, il dévoie le débat en le conduisant  le plus souvent à s’écarter de la question posée (vote contre un homme ou une politique). Appelant une réponse binaire  (oui ou non) il est peu approprié au traitement de questions complexes. Il doit donc être strictement limité aux matières constitutionnelles proprement dites.

3.3. La loi

Outre le référendum, le peuple exerce sa souveraineté par la médiation de ses représentants. L’article 6 de da Déclaration de 1789, qui fait partie du « bloc de constitutionnalité » actuel, proclame que la loi est l’expression de la volonté générale, tandis que l’article 34 de la constitution dispose que la loi est votée par le Parlement. En vertu du principe de séparation des pouvoirs et pour équilibrer les fonctions normatives de l’exécutif et du législatif, les articles 34 et 37 définissent les champs respectifs de la loi et du décret. Tel est du moins le schéma théorique car, dans la réalité, c’est le Gouvernement qui a largement l’initiative du travail législatif, en fixant pour l’essentiel l’ordre du jour du Parlement et en réservant la plus grande place à ses projets, tandis que les textes d’origine parlementaire, les propositions de lois, sont réduites à la portion congrue. Une telle pratique n’est pas conforme aux principes affichés et le préjudice est d’autant plus important que la Constitution a été modifiée en 1992 par l’introduction d’un article 88-2 disposant notamment que : « la France consent aux transferts de compétences nécessaires à l’établissement de l’union économique et monétaire européenne … »,  ce qui se traduit par une entrée en force du droit européen en droit interne français et limite, en conséquence, les prérogatives du Parlement national. De plus, la montée en puissance du Conseil constitutionnel à partir de 1971 en a fait un organisme politique en forme juridictionnelle qui s’est doté, au fil du temps et par voie jurisprudentielle, d’un pouvoir constituant permanent en dehors de toute source de légitimité, même si on peut considérer qu’il n’en a pas abusé et qu’il a joué parfois un rôle positif en matière de défense des libertés publiques. La représentation est donc en crise, ce qui se traduit en particulier par une hausse générale des taux d’abstentions à toutes les élections, et notamment aux élections locales qui sont pourtant celles où le citoyen est le plus proche des lieux de pouvoir et qui devraient l’intéresser davantage.

La situation est encore aggravée par le fait que si l’article 20 de la Constitution prévoit bien que « Le Gouvernement détermine et conduit la politique de la Nation », cela dépend de la concordance ou non des majorités présidentielle et législative. Lorsqu’il y a concordance, c’est le Président de la République qui est maître de l’exécutif ; dans le cas contraire, celui de la cohabitation, c’est le Premier ministre qui a l’essentiel des compétences, même si son but est de devenir, à son tour, président, avec une majorité conforme. Cette constitution, si souvent rapetassée au cours de la dernière période, est donc, au surplus, de caractère aléatoire, ce qui est un non-sens constitutionnel et très malsain pour la démocratie. L’instauration du quinquennat a aggravé le phénomène en accroissant la concurrence des compétences entre les deux têtes de l’exécutif. C’est donc le statut du Président de la République, aujourd’hui clé de voûte des institutions, qui est le point de départ de toute réforme institutionnelle conséquente.

C’est pourquoi le choix fait ici, est celui du régime parlementaire[5]. Selon cette conception, le pouvoir exécutif appartient, sous la direction du Premier ministre, au Gouvernement. Responsable devant le Parlement, il détermine et conduit effectivement la politique de la nation. La légitimité émane du corps législatif, élu selon un scrutin égal, c’est-à-dire se rapprochant le plus possible de la proportionnelle. Les arguments selon lesquels cela aurait pour conséquence de faire entrer le Front national au Parlement, ou bien que la priorité est la constitution d’une majorité forte plutôt que la fidèle représentation du peuple ne sauraient y faire obstacle. C’est au débat politique et non à la technique électorale de faire les majorités, de définir la voie à suivre et d’exprimer par la loi la volonté générale. On  discutera aussi le la question de savoir s’il faut une assemblée parlementaire ou deux en fonction de la concentration plus ou moins affirmée du pouvoir politique et de l’organisation administrative.

Il y a au sein de l’Union européenne une majorité de régimes parlementaires.

3.4. L’exécutif

C’est la question majeure. Le rejet de l’élection du Président de la République au suffrage universel est le point central de toute réforme démocratique. Ilrepose sur plusieurs raisons.

Premièrement, le caractère plébiscitaire de cette élection l’inscrit sur la ligne de forces césarienne ; les références historiques sont celles des deux Empires.

Deuxièmement, il ne saurait y avoir deux sources de légitimité concurrentes de la représentation nationale et populaire. Or, en France, pour des raisons historiques et par le jeu naturel des pouvoirs, la légitimité d’un président élu au suffrage universel l’emportera toujours sur celle que partagent plusieurs centaines de parlementaires élus localement au scrutin majoritaire. Il faut donc choisir : le Parlement ou le Président. Comment soutenir qu’est conforme à la ligne de force traditionnelle des Lumières, cette délégation massive de souveraineté que représente l’élection du Président de la République au suffrage universel ?

Troisièmement, la supériorité institutionnelle du Président élu en fait le guide de la nation et dérive fatalement vers un pouvoir autocratique sur le base des pouvoirs considérables qui lui sont conférés par la constitution, notamment en situation de crise. Au surplus, le passé récent a montré avec quelle désinvolture le Président a usé de la constitution pour s’arroger des prérogatives qui ne sont pas les siennes (art. 20, par exemple).

Quatrièmement, la conquête du pouvoir devient dans ces conditions le principal objectif des formations politiques et non le service de l’intérêt général, a fortiori la transformation sociale. Dès lors, les partis se transforment en machines électorales, le cas échéant subdivisées en « écuries » présidentielles, la communication prend le pas sur le débat et la politique devient spectacle, la bataille s’engage sur des critères de rassemblement superficiel et se gagne au centre.

Cinquièmement, cette élection confine ainsi au déni de démocratie et soumet le citoyen à la fatalité des contraintes extérieures, au conformisme opportuniste, à la pensée unique, à la résignation et à l’abaissement.

Dans une constitution démocratique, le Président de la République garderait néanmoins un rôle prestigieux : il représente la France vis-à-vis de l’étranger, il est l’expression symbolique de l’unité et de l’indivisibilité de la République, le garant de la continuité des pouvoirs publics. Il n’est plus élu au suffrage universel direct, mais soit par un collège de grands électeurs, soit par le Congrès du Parlement . La durée de son mandat est dès lors secondaire, la plus longue durée, sans possibilité de renouvellement, pouvant même correspondre à la plus grande banalisation. À cet égard, le mandat de sept ans non renouvelable est sans doute la solution la plus judicieuse dans la gamme des solutions possibles. L’argument selon lequel il faudrait tenir compte de l’idée que l’on se fait de la prétendue adhésion définitive du peuple français à l’élection du Président de la République au suffrage universel n’est que l’expression d’une résignation politique, indigne de notre histoire.

3.5. L’État de droit

Face à ce schéma, certains  évoqueront un  retour au régime d’assemblée. On n’ignore rien des critiques qui sont adressées à ce régime sur la base, principalement, de l’expérience de la IVe  République. En réalité, l’instabilité de la IVe  République n’a pas été causée par un excès de démocratie, mais au contraire par les atteintes que les manœuvres des clans politiques lui ont portées. Aucune constitution ne peut être, seule, la solution des contradictions sociales. Mais à tout prendre, il faut préférer les institutions qui les révèlent à celles qui les dissimulent. Les contradictions apparaissant clairement, les conditions sont meilleures pour leur apporter une solution efficace. C’est aussi un appel à la responsabilité des élus qui doivent alors savoir constituer des majorités d’idées quand c’est nécessaire et faire preuve de courage politique en toute circonstance, plutôt que de se résigner à l’allégeance au chef qui caractérise le régime présidentiel.

Toute proposition institutionnelle  doit veiller à s’inscrire dans une scrupuleuse cohérence de l’État de droit. On ne développera pas ici les conditions de la cohérence interne qui reposent essentiellement sur la séparation des pouvoirs et sur l’équilibre délicat à établir entre le principe d’autonomie de gestion des collectivités territoriales et celui d’unité et d’indivisibilité de la République. Il conviendrait aussi de préciser les formes nouvelles de la dualité des ordres juridictionnels administratif et judiciaire, dualité souhaitable car relevant de la distinction public-privé, classique en France. Un contrôle de constitutionalité est nécessaire. La souveraineté ne pouvant émaner que du peuple, c’est à lui ou à ses représentants qu’il revient en définitive d’assurer la conformité des lois à la Constitution ; sur les questions les plus importantes par le recours au référendum constituant en veillant à éviter toute dérive plébiscitaire ; sur des questions moins importantes par la recherche d’une compatibilité tant juridique que politique dans le cadre du Parlement puisque c’est lui qui vote la loi. Un Comité constitutionnel composé de représentants des différents groupes parlementaires auxquels s’adjoindraient des magistrats du Conseil d’État et de la Cour de cassation devrait être institué à cette fin. Il n’aurait pas le pouvoir d’empêcher la promulgation d’une loi non conforme à la Constitution, mais seulement d’identifier cette non-conformité en invitant le Parlement à la prendre en considération à l’occasion d’un nouvel examen qui conduirait, soit à modifier la loi, soit à provoquer l’engagement d’une procédure de révision constitutionnelle[6].

Une réflexion sur les institutions nationales ne peut aujourd’hui faire l’économie d’une prise en compte des institutions supranationales. Ele doit veiller à leur cohérence externe. C’est possible grâce au principe de subsidiarité introduit à l’article 5 du Traité sur l’Union européenne aux termes duquel : « Dans les domaines qui ne relèvent pas de sa compétence exclusive, la Communauté n’intervient que si et dans la mesure où les objectifs de l’action envisagée ne peuvent pas être réalisés de manière suffisante par les États membres et peuvent donc, en raison des dimensions ou des effets de l’action envisagée, être mieux réalisés au niveau communautaire »[7]. Certes, cette formulation laisse une trop large place à l’appréciation de l’opportunité de l’intervention de l’Union européenne et il n’y a pas lieu de faire une confiance aveugle aujourd’hui à l’appréciation de la Cour de justice de l’Union européenne. Une articulation des institutions nationales et transnationales doit cependant être recherchée, notamment par une application convenable de l’article 55 de la constitution comme il a été dit.

3.6. La citoyenneté

Nous avons vu, au début que l’affirmation de l’autonomie de l’État s’était accompagnée de celle des droits de l’homme et du citoyen. On ne saurait en effet dissocier une réflexion sur le rôle de l’État de celle sur le contenu de la citoyenneté

La vocation des institutions est aussi de concourir à la formation d’une citoyenneté finalisée par des valeurs fortes, à vocation universelle : service public, droit du sol, laïcité, responsabilité publique, dans la tradition républicaine française[8]. Pour autant, des dimensions supranationales peuvent être mises en perspective.

Une citoyenneté européenne a été décrétée par le traité de Maastricht et est explicitée dans les articles 20 et suivants du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne. Mais il ne s’agit que d’une citoyenneté de faible densité, de superposition. On a pu parler à son sujet d’objet politique non identifié.

On peut s’attacher également à l’enrichissement des prémices d’une citoyenneté mondiale par l’affirmation de valeurs universelles, l’émergence d’un monde commun dans le cadre d’une mondialisation qui n’est pas seulement celle du capital.

La citoyenneté est aussi une préoccupation majeure d’une réflexion sur le socialisme – notion aujourd’hui largement ignorée ou dénaturée – . Le socialisme était fondé dans l’acception marxiste sur la propriété publique des grands moyens de production, d’échange et de financement, le pouvoir de la classe ouvrière et de ses alliés, l’émergence d’un « homme nouveau ». On sait que dans l’épopée des pays du « socialisme réel », ces trois fondamentaux se sont traduits par : l’étatisme, la nomenklarura et l’arbitraire, la persistance des aliénations. Il s’agit aujourd’hui de concevoir une nouvelle appropriation sociale, de construire la démocratie institutionnelle et de faire de la citoyenneté un objectif central et non une conséquence des transformations structurelles. Cela passe sans doute par une recomposition fondée sur les choix de chaque citoyenne et de chaque citoyen constitutif d’un « génome » de citoyenneté. Le problème serai alors de réaliser sur cette base des centralités sociales démocratiques et efficaces.


[1] J-M. Denquin, La monarchie aléatoire, PUF, 2001.

[2]  Projet constitutionnel du PCF et Rapport d’Anicet Le Pors, l’Humanité, 18 décembre 1989.

[3] «Art. 58. –  Le projet est imprimé et envoyé à toutes les communes de la République, sous ce titre : loi proposée.

Art. 59. – Quarante jour après l’envoi de la loi proposée, si, dans la moitié des départements, plus un, le dixième des assemblées primaires de chacun d’eux, régulièrement formées, n’a pas réclamé, le projet est accepté et devient loi. ».

[4] O. Duhamel, Droit constitutionnel et politique, Seuil, 1993, p. 116.

[5] A. Le Pors, « On fait clairement le choix du régime parlementaire », l’Humanité, 10 octobre 2005.

[6] A. Le Pors, « L’enjeu du contrôle de constitutionnalité », l’Humanité, 8 avril 2006.

[7] Dans tous les textes qui en émanent, la Communauté européenne a été remplacée par l’Union européenne.

[8] A. Le Pors, La citoyenneté, PUF, coll. Que sais-je ?, 2010  (4e  éd.).