« Saisonniers : quelles mesures pour sortir de la crise ? »
Un statut pour les travailleurs saisonniers du tourisme
À l’initiative de Michelle DEMESSINE alors chargé du ministère du Tourisme, un rapport a été élaboré en 1998 intitulé Propositions pour l’amélioration de la situation sociale et professionnelle des travailleurs saisonniers du tourisme. Ce rapport a été publié à la Documentation française en 1999.
te mission a donné lieu à une très large concertation avec tous les acteurs du secteur. Il a abouti à 31 propositions très précisément analysées dans les objectifs et les moyens, couvrant aussi bien la statistique du secteur que de l’emploi et de la formation, la lutte contre le « travail au gris », le logement, les transports, la médecine du travail, les salaires, le dialogue social et le droit syndical.
Aussi sérieusement que ces propositions aient été établies, la liste de ces 31 propositions ne nous donnait pas totalement satisfaction en raison de leur caractère essentiellement analytique qui ne traduisait pas suffisamment la dimension politique de la situation des travailleurs du secteur et la cohérence et l’unité des solutions proposées.
Je me suis gardé longtemps de parler de « statut » pour ne pas accréditer l’idée que, ancien ministre de la Fonction publique, je voulais faire des saisonniers des fonctionnaires. Mais ce sont les saisonniers eux mêmes et leurs organisations syndicales qui ont fini par dire « ce qu’il nous faut c’est un véritable » statut » ». Certes, le mot était pris dans une autre acception que celle du Statut général des fonctionnaires, mais l’intention était claire : sécuriser les parcours professionnels et améliorer les conditions matérielles et morales de ces activités, notamment par la loi et le règlement.
ela nous a conduit à présenter nos propositions en cinq volets :
1° Appliquer effectivement le droit existant.
2° Réactiver les négociations collectives.
3° Élaborer un projet de loi reprenant l’ensemble des questions s étudiées.
4° Prendre les mesures réglementaires nécessaires : pour les dispositions législatives et réglementaires des projets ont été rédigés.
5° Développer les partenariats entre l’État et les acteurs du secteur.
C’est finalement cet ensemble, voulu cohérent, que nous avons appelé « statut des travailleurs saisonniers du tourisme ».
* D’ou ma première conclusion : qu’est-ce que tout cela est devenu ? Un inventaire rapide serait sans doute utile indiquant ce qui a été réalisé, ce qui ne l’a pas été et pourquoi ? Ce qui était pertinent et ce qui ne l’était pas et pourquoi ? Un inventaire qui pourrait être un nouvel état des lieux et un nouveau départ sur la base d’un nouveau rapport.
* Ma seconde conclusion tient à l’extension du débat, 17 ans plus tard, de la question de la précarité au travail. La question était au cœur des négociations sur l’accord national interprofessionnel (ANI) de janvier 2013 (loi du 11 juin 2003). Mais elle a conduit aussi certaines organisations syndicales a proposer un « nouveau statut du travail salarié » ou, mieux, une véritable « sécurité sociale professionnelle ». Je préfère pour ma part parler d’un « statut des travailleurs salariés du secteur privé » dans l’esprit de la voie ouverte par le « statut des travailleurs saisonniers du u tourisme ». Cette réflexion sur les saisonniers pouvant d’ailleurs être étendue aux travailleurs saisonniers d’autres secteurs, agricole notamment.
On le voit, aujourd’hui comme hier, il est très important de réfléchir à la situation des travailleurs saisonniers du tourisme que j’avais à l’époque qualifiés de « prolétaires des temps modernes ». Ils demeurent aujourd’hui la caricature des travailleurs précaires. Ce qui justifie fondamentalement l’intérêt de ce colloque.