« La République et l’universel … »- L’Humanité, le 4 novembre 2016

 » …mariage d’amour ou de raison ? « newlogohumanitefr-20140407-434

 

La référence aux « valeurs » de la république peut-elle faire consensus ?

images1Aucun texte ne définit ce que sont les « valeurs » de la République. Dès lors, comment pourrait-on rechercher, voire exiger, un quiconque consensus sur un ensemble indéterminé ou laisser à la discrétion de chacun le soin d’en décider ? Il y aurait même un danger totalitaire à voir un clan ou une communauté prétendre détenir les bonnes valeurs et vouloir les imposer à tous. Le caractère évanescent des valeurs permet certes de les évoquer dans le débat politique, mais n’en fait pas pour autant des instruments de l’État de droit permettant d’assurer la cohésion sociale et la démocratie. Ainsi, « Liberté, Égalité, Fraternité » seraient des valeurs inopérantes si on ne les déclinait pas en principes, seuls en mesure d’édicter des normes réglant les conditions de la vie harmonieuse en société : « principes fondamentaux reconnus par les lois de la République » (Déclaration des droits de 1789, Préambule de la constitution de 1946), ou « principes généraux du droit » identifiés par la pratique juridique sur le terrain du droit positif. Mais les principes eux-mêmes sont évolutifs et parfois contradictoires. Par exemple, il n’est pas toujours facile de résoudre les contradictions entre le principe d’indivisibilité de la République et celui de libre administration des collectivités territoriales. Ou encore, le principe de laïcité est un, alors que les spiritualités qu’elle protège sont multiples. On ne doit donc pas affubler la laïcité de qualificatifs par commodité consensuelle.

 

La crise de la représentation met-elle en danger le « modèle républicain »

Non. La crise de la représentation n’est que la traduction dans l’organisation des pouvoirs de la crise de civilisation dans laquelle nous nous trouvons après l’effondrement du XXe siècle « prométhéen ». La réponse doit donc être recherchée dans l’accomplissement de la « métamorphose » dont parle Edgard Morin. Cela ne dispense pas pour autant de réfléchir à l’amélioration de la représentation politique qui reste indispensable en l’état de la société et de la technique. Il est certes plus facile de voir aujourd’hui ce qu’il faut écarter : de nouveaux rafistolages constitutionnels, les bricolages peu responsables, de l’extrême gauche à l’extrême droite, sur une VIe République, le recours qui tend à prospérer de la représentation par tirage au sort qui ouvrirait la voie aux soi-disant experts et aux aventuriers. S’Il est nécessaire de récuser l’existant nocif, la priorité est d’approfondir et d’étendre l’accord sur des questions-clé telles que : la souveraineté nationale et populaire, les moyens de la démocratie directe (référendum strictement circonscrit), la démocratie parlementaire reposant sur un scrutin proportionnel, la responsabilité effective du gouvernement dans la conduite des politiques publiques, la suppression de l’élection du Président de la République au suffrage universel.

 

La république, exception française ou modèle appelé à l’universalité concrète ?

Aucun pays ne peut avoir l’arrogance de se donner en modèle universel, mais tous ont le devoir de tendre au bien commun. Cela suppose un débat sur la notion de valeurs universelles et l’adoption de principes communs : interdiction de l’esclavage, de la torture de la peine de mort ; protection de la planète et développement solidaire ; plus tard, peut être, propriété publique, service public, laïcité. La mondialisation est en marche dans tous les domaines, matériels et immatériels. L’affirmation du genre humain comme sujet de droit sera la grande affaire du XXIe siècle.

Au sein de cette évolution, la France, qui est l’une des nations les plus expérimentées, peut y jouer un rôle particulièrement utile en raison de la conception de la citoyenneté qu’elle a su forger au cours de son histoire. Simultanément reconnue comme patrie des droits de l’homme et du citoyen et terre d’asile, elle reste, en dépit des dénaturations des récentes décennies, une référence forte pour tous les peuples.

Liberté 29 mai 2014 - Paris_Remy CARTERET

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