La fonction publique – Tribune de « Libération », 4 mai 2018

 

La Fonction publique : une idée d’avenir

 

Privilégiés et trop nombreux, les fonctionnaires ? Dépassé, rigide, inapproprié leur statut ? Ces affirmations, assénées comme des évidences jamais démontrées, visent encore une fois à justifier de prétendues réformes qui, présentées comme de simples modernisations, minent en fait le statut général des fonctionnaires. Elles manifestent une ignorance délibérée de l’histoire, de la réalité et du rôle de la Fonction publique dans notre société et esquivent le débat sur leurs enjeux en termes de cohésion sociale, de solidarités, de développement économique, d’effectivité des droits, de développement durable..

Si le choix a été fait d’un statut défini par la loi et non le contrat, c’est fondamentalement que les fonctionnaires ont en charge l’intérêt général lequel ne peut se réduire à une somme d’intérêts particuliers. La Fonction publique est une construction rationnelle qui répond aux besoins des services publics et aux principes qui les régissent : l’égalité, la continuité, l’adaptabilité, la laïcité. Elle repose sur un certain nombre de principes  liés aux fondements de notre démocratie: le principe d’égalité qui se traduit notamment dans le recrutement par concours, le principe d’indépendance avec la séparation du grade et de l’emploi qui constitue une garantie fondamentale aussi bien pour le fonctionnaire – qui est ainsi protégé des pressions locales ou des tentatives de faire prévaloir des intérêts particuliers- que pour l’usager, pour qui sont ainsi assurées les conditions d’une égalité de traitement et d’une pérennité de l’action publique ; le principe de responsabilité qui rend le fonctionnaire responsable de son action et l’oblige à en rendre compte.

Et ce qui est souvent dénoncé comme des privilèges n’est qu’un ensemble de droits mais aussi de contraintes qui s’articulent pour répondre aux besoins des services publics et des usagers.

Nos services publics ont besoin d’agents qui travaillent ensemble avec des droits et des obligations communs, s’articulant avec des règles particulières adaptées à chacun des secteurs d’activité. C’est ce que permet pour les fonctionnaires leur statut: il assure à la fois le respect de principes fondamentaux et la souplesse de fonctionnement et de gestion.

Ce statut n’est ni un monument ni une pièce de musée; il n’a cessé de vivre, d’évoluer, de s’adapter aux besoins de la société et il doit continuer à le faire. Mais ces évolutions doivent prendre appui sur les principes qui le fondent et être démocratiquement débattues avec les agents et les usagers, à l’inverse de ce qui se dessine actuellement.

Nous devons penser l’avenir, faire face aux enjeux du XXIème siècle, ceux d’une prise de conscience accrue d’un destin commun de l’humanité et d’une affirmation nouvelle de valeurs universelles : droits fondamentaux, protection de l’écosystème mondial, accès aux ressources naturelles indispensables, droit au développement, mobilité des personnes, diversité culturelle, égalité femmes-hommes, devoir d’hospitalité, sécurité… Ils nécessitent que tous, fonctionnaires, usagers, élus, citoyens, construisent par le débat une meilleure prise en charge collective d’un intérêt général de plus en plus étendu : c’est précisément ce que permettent les services publics et la fonction publique et ce qui fonde leur modernité et la nécessité de les préserver.

Et c’est pourquoi nous sommes aux côtés de celles et ceux qui se mobilisent pour défendre et promouvoir ce projet éminemment moderne et progressiste.


Signataires 

Gérard Aschieri, membre CESE

Jean Auroux, ancien ministre

Roland Berthilier, président de la MGEN

Frédéric Boccara, économiste, membre du CESE

Alain Bonhomme, Inspecteur général honoraire des Affaires culturelles

Françoise Bosman, conservatrice générale honoraire du patrimoine

Olivier David, président de l’Université de Rennes 2

Jérôme Deauvieau, directeur du département sciences sociales de l’ENS

Jean Paul Delahaye, Inspecteur général honoraire de l’Éducation nationale

Jean Paul Demoule, professeur des universités émérite, ancien président de l’INRAP

Michel Dubromel, président de France Nature Environnement

Christian Favier, président du Conseil départemental du Val-de-Marne

Eric Favey, président de la Ligue de l’Enseignement

Charles Fiterman, ancien ministre

Jacques Fournier, conseiller d’État honoraire

Pascale Gonod, professeur des universités

Yves Jean, Président de l’Université de Poitiers

Marylise Lebranchu, ancienne ministre

Anicet Le Pors, ancien ministre, conseiller d’État honoraire

Willy Pelletier, coordinateur général de la Fondation Copernic

Patrick Pelloux, président de l’Association des médecins urgentistes de France (AMUF), écrivain

Sophie Pochic, directrice de recherches au CNRS

Christophe Prudhomme, médecin urgentiste

Jacques Rigaudiat, conseiller maître honoraire à la Cour des Comptes

Philippe Rio, maire de Grigny

Suzy Rojtman, porte parole du Collectif national pour les Droits des Femmes

Luc Rouban, directeur de recherches au CNRS

Malik Salemkour, président de la Ligue des Droits de l’Homme

Aurélie Trouvé co présidente d’ATTAC

 

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