Assises du service public en Seine-St-Denis – 24 mai 2012

CGT-CFDT-FO-FSU-CFTC-UNSA-CNL-LDH-FCPE-RSF   93

HISTOIRE ET FUTUR DU SERVICE PUBLIC

Le service public après les présidentielles

Les services publics ont été au cœur des grands mouvements politiques et sociaux des dernières années : la grève de 1995, le rejet du traité constitutionnel européen en 2005, la dernière campagne présidentielle.

1. UNE CONCEPTION FORGÉE AU COURS DE L’HISTOIRE

1.1.      La primauté de l’intérêt général

Une lignée très ancienne : l’empereur Justinien (Digeste au VIe siècle), Philippe Le Bel (Conseil d’État du Roi), la Révolution française, la Révolution de 1848, la Commune de Paris, l’École française de service public, le Conseil national de la Résistance … Il s’est incarné dans de fortes personnalités. L’intérêt général n’est pas la somme des intérêts particuliers.

L’ « optimum social » des économistes néoclassiques est réducteur.

Le juge administratif a considéré qu’il revenait au politique de définir l’intérêt général. Mais il a su le reconnaître dans les fonctions régaliennes, dans la déclaration d’utilité publique, p. ex. Sa traduction opérationnelle : le service public.

1.2.      Le service public « à la française »

À l’origine une notion simple : mission d’intérêt général-personne morale de droit public-juge et droit administratif. Couverture par l’impôt et non par les prix. Existence de prérogatives de service public.

Une notion devenue complexe : interférence public-privé (régie, concession, délégation de service public …). Le contrat étend son champ au détriment de la loi.

La contradiction s’exacerbe dans le cadre de la construction de l’Union européenne : ignorance de la notion, prévalence de l’économie de marché, Des ajustements par la jurisprudence de la CJUE et la reconnaissance des SIG (SIEG, SNEIG). Neutralité au regard du régime de propriété (art. 345 TFUE).

1.3.       La conception française de la fonction publique

Une longue tradition : intendants au XVe, ingénieurs des Ponts au XVIIe, les bureaux sous la monarchie, les principes de la Révolution française, la conception autoritaire au XIXe siècle et la première moitié du XXe (« statut carcan » et « statut jurisprudentiel »). Le statut de Vichy du 19 septembre 1941. Le statut général du 19 octobre 1946. Ordonnance du 4 février 1959. Lois du 13 juillet 1983, 11 et 26 janvier 1984, 9 janvier 1986.

L’élaboration contradictoire du statut actuel entre conception « de carrière » ou « d’emploi ». Les trois principes : égalité (art. 6 DDHC de 1789) ; indépendance (loi sur les officiers de 1884), responsabilité (art. 15 DDHC). Une fonction publique « à trois versants ».

Montée en puissance de la fonction publique : en effectifs statutaires (200 000 au début du XXe  siècle, 1 million en 1946, 2,1 million en 1981, 5,3 millions aujourd’hui, plus de 6 millions avec les agents sous statuts du service public). Dispositions législatives : 146 en 1946, 57 en 1959, plus de 500 en 1986, 1 600 aujourd’hui dans le projet de code ?). Le statut actuel : la plus grande longévité malgré F. Mitterrand (29 ans).         

 2. LES QUESTIONS MAJEURES D’AUJOURD’HUI

La politique antérieure : une « banalisation » de la France selon M. Gauchet.

L’expérience des alternances passées : la gauche consacre les atteintes de la droite au service public voire les aggrave (privatisations, déréglementations).

2.1.      La dépense publique

La réduction de la dépense publique par l’effet de la LOLF et de la RGPP. Le démantèlement de l’administration « rationalisante » (DATAR, CGP, HCEE, CNE, …). Déficit de la pensée rationnelle. La France n’est pas sur-administrée (93 agents publics pour 1000 habitants).

*** Le contexte : austérité budgétaire ou croissance ? Comment reconstruire une méthode et une gestion rationnelle et démocratique ? Quelle appropriation sociale ? Quelle démocratie institutionnelle ? Quelle conception de la citoyenneté (notamment pour les agents du service public  – les « désobéisseurs ») ?

2.2.      La réforme territoriale

La recherche de l’équilibre entre pouvoir central et pouvoirs décentralisés et déconcentrés n’a jamais été réalisée de manière satisfaisante (Les trois actes de la décentralisation : 1982, 2003, 2009). Le « mille-feuille » administratif (discours de St-Dizier du 19 octobre 2009) contesté par les niveaux pertinents, politiques (commune, département, nation), économiques (intercommunalité, région, Europe).  Les décisions majeures : suppression de la taxe professionnelle, conseiller territorial, métropole, préfet de région.

*** Que faire de la réforme territoriale en cours ? Seul engagement : le renoncement au conseiller territorial ? Quelles conséquences sur le service public (champ des services, emploi, contractualisation, clientélisme) ?

2.3.      Le statut général des fonctionnaires

La « révolution culturelle » annoncée le 19 septembre 2007 n’a pas eu lieu dans la crise. Le service public a été un puissant « amortisseur social ».

*** Dans quelle mesure seront remises en cause les atteintes portées dans le passé au statut généra, si le « grand soir statutaire » est écarté ? Quelle position sur le Code envisagé ? Faut-il un « statut législatif  pour les travailleurs du secteur privé » sécurisant les parcours professionnels et susceptible de convergence, à terme, avec le statut des fonctionnaires ?

3. QUELS OBJECTIFS DE LUTTE ?

3.1.      Affirmer valeurs et principes

Le rapport Silicani n’ignorait pas les valeurs. Défendre les valeurs du service public (égalité, continuité, adaptabilité), de la fonction publique (égalité, indépendance, responsabilité), de l’aménagement territorial (unité de la République, libre administration, subsidiarité). Plus généralement réinvestir l’histoire, la science, la morale.

3.2.       Faire des propositions

Sur le service public (révision de la LOLF et abrogation RGPP) et la fonction publique (grille indiciaire, titularisation, mobilité, double carrière, égalité hommes-femmes, dialogue social …). Il n’y a pas de texte sacré.

3.3.      S’inscrire dans une perspective

Ne pas se contenter de défendre. La montée de l’ « en-commun » mondial (valeurs, globalisation, droit et institutions) favorable à la notion de service public. Progression de la conscience de l’unité de destin du genre humain et son expression dans le vocabulaire (« terre-patrie » et « métamorphose » d’E. Morin, « destination universelle des biens » de Vatican II, « manifeste pour des biens de haute nécessité » de P. Chamoiseau et E . Glissant, « patrimoine commun de l’humanité » …). Le XXIe siècle « âge d’or » du service public.

 

 

 

 

 

 

 

 

LES POLITIQUES PUBLIQUES DE L’IMMIGRATION ET DE L’ASILE DEPUIS 1945

Le droit d’asile ne saurait être banalisé au sein du droit des étrangers. Toutefois, les gouvernements successifs ont réglementé dans une même démarche immigration et asile. Il s’ensuit que, si l’on peut comprendre que les flux migratoires, pour raisons économiques, soient sensibles aux variations de la conjoncture, la politique de l’asile en est indépendante et ne doit être définie qu’au regard des principes républicains. On constate, au contraire, que politique de l’immigration et politique de l’asile ont connu les mêmes vicissitudes.

 

 

1945-1970 : des références juridiques majeures dans un contexte de croissance économique soutenue et d’évènements politiques aux conséquences limitées sur l’accueil des étrangers

 

L’ordonnance du 2 novembre 1945 relative aux conditions d’entrée et de séjour des étrangers en France, plusieurs fois modifiée, a été pendant soixante ans la référence de la législation sur l’immigration. En matière d’asile, le dispositif a été complété par la signature le 28 juillet 1951 de la Convention de Genève et la loi du 25 juillet 1952 créant l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) et la Commission de recours des réfugiés (CRR).

 

La période est marquée par des évènements politiques importants dans le monde et en France : guerre froide, guerres de décolonisation, naissance de la Ve République, évènements de 1968. Mais la croissance économique soutenue et le maintien de liens avec les anciens pays colonisés permettent une gestion de l’immigration et de l’asile sans tension excessive n’appelant pas de bouleversement des politiques correspondantes et des systèmes juridiques associés.

 

Mais la situation va changer dans les années 1970. Dès 1968,  un accord franco-algérien réglemente de façon particulière la présence en France des Algériens et de leur famille

 

 

1970-1981 : une régression de l’accueil des étrangers déterminée par le ralentissement de l’économie

 

Une politique de contrôle des flux migratoires se met en place avec la circulaire Marcelin-Fontanet du 22 février  1972 subordonnant la délivrance d’une carte de séjour à l’obtention d’un contrat de travail et d’un logement décent . Le Conseil des ministres du 3 juillet 1974, sous la présidence de Jacques Chirac, met fin à l’introduction de travailleurs immigrés ; la suppression en septembre de la même année de l’immigration familiale sera annulée plus tard par le Conseil d’État.

 

Un décret du 21 novembre 1975 fait obligation aux administrations de vérifier, avant la délivrance d’une autorisation de travail, « la situation de l’emploi, présente et à venir, dans la profession demandée et dans la région ». Un autre décret du 29 avril 1976 fixe les conditions du regroupement familial qui seront encore restreintes l’année suivante. Mais sur recours du GISTI, de la CFDT  et de la CGT le Conseil d’État annule ces mesures, rappelant que le regroupement familial relève d’un principe général du droit.

 

La loi Bonnet du 10 janvier 1980 fait de l’entrée ou du séjour irréguliers des étrangers des motifs d’expulsion au même titre que la menace pour l’ordre public. La place des immigrés dans la société et l’économie françaises donne lieu à des débats très vifs ; un rapport interministériel Immigration et développement économique et social établit, en 1976, que les immigrés constituent un facteur de compétitivité pour l’économie française et qu’ils sont contributeurs nets au budget social de la nation.

 

 

1981-1993 : des tentatives de régularisation contrariées et un certain retour aux principes. Engagement de la coopération intergouvernementale européenne.

 

L’alternance consécutive à l’élection de François Mitterrand le 10 mai 1981 est marquée par la régularisation de 132 000 étrangers sur 150 000 demandes. La loi Deferre du 29 octobre 1981 définit des catégories d’étrangers protégées des expulsion, mais cette loi légalise aussi le « rétention administrative » d’étrangers en instance d’expulsion.

 

François Mitterrand reçoit le 3 décembre1981 les participants à la « marche pour l’égalité » et s’engage à inscrire dans la loi une carte de résident de dix ans. Cette carte est créée par la loi Joxe du 17 juillet 1984 ; elle est attribuée de plein droit à plusieurs catégories d’étrangers disposant d’attaches personnelles et familiales fortes en France. Toutefois, le regroupement familial « sur place » est interdit par un décret du 4 décembre 1984. Une circulaire du 17 mai 1985 sur l’asile décrit les dispositions qui permettent de refuser le séjour  et la procédure d’admission. Les demandeurs d’asile sont autorisés à travailler

*** Conclusion des accords de Schengen le 14 juin 1985. Ils seront complétés par une convention d’application du 19 juin 1990. La convention de Dublin du 15 juin 1990 entrera en vigueur en 1997.

 

Dans le cadre de la première cohabitation (1984-1986), la loi Pasqua du 9 septembre 1986 restreint les conditions d’obtention de la carte de résident. Les possibilités données aux préfets de procéder à des reconduites à la frontière sont élargies,  les procédures d’expulsion renforcées. D’octobre 1986 à janvier 1987, 6 500 étrangers en situation irrégulière sont renvoyés par charters.

 

À la fin de la période de cohabitation, changement d’orientation avec la nouvelle loi Joxe du 2 août 1989 qui ne revient que partiellement sur la loi Pasqua concernant la carte de résident. Le Premier ministre Michel Rocard crée, en 1990, le Haut Conseil à l’intégration.

 

Les accords de Schengen qui créent un visa d’entrée unique pour un certain nombre de pays européens sont ratifiés le 4 juin 1991 ; ils établissent également un fichier d’information unique pour les étrangers recherchés ou expulsables et renforcent la coopération policière et juridique.

 

Le 8 juillet 1991, la nouvelle Première ministre, Edith Cresson, annonce une politique de renvoi par charters des étrangers en situation irrégulière. Dans le même temps est engagée une régularisation sous conditions des déboutés du droit d’asile : 15 000 demandes seront acceptées sur 50 000 déposées. Simultanément, une circulaire du 26 septembre met fin au droit au travail des demandeurs d’asile, tandis que le Conseil d’État fait du droit au séjour des demandeurs d’asile un principe général du droit par un arrêt du 13 décembre 1991. La loi Sapin du 31 décembre 1991 sur la double peine instaure la protection des étrangers contre l’éloignement pour les étrangers en France depuis plus de 15 ans.

 

Une loi du 6 juillet 1992  légalise les zones d’attente dans les ports et les aéroports.

 

 

1993-1997 : développement d’une politique coercitive d’immigration avec engagement d’un transfert des compétences en matière d’asile au niveau européen

 

Après le changement de majorité parlementaire, de nombreuses lois sont adoptées concernant les étrangers. La loi du 22 juillet 1993 réforme les conditions d’accès à la nationalité française, elle revient notamment sur l’accès à la nationalité française des enfants étrangers nés en France. Une seconde loi Pasqua du 24 août 1993 met en place un important arsenal répressif  : limitation de l’accès au séjour des familles, durcissement des conditions de rétention et d’expulsion, de contrôles d’identité, d’admission au séjour des demandeurs d’asile (Schengen, Dublin, pays sûrs, troubles à l’ordre public, recours abusif).

 

Les accords de Schengen entrent en application le 25 mars 1995. Cette politique provoque des réactions sociales : grève de la faim de parents d’enfants français en avril-mai 1995, grève de la faim de sans-papiers de l’Église Saint-Bernard en juillet-août 1996 suivie d’expulsion, manifestation à Paris le 27 janvier 1997.

 

La loi Debré du 24 avril 1997 est marquée par ces conflits. D’une part, elle renforce les possibilités de contrôles d’identité dans les zones frontalières, la prise d’empreintes digitales, les procédures de rétention administrative. D’autre part, elle ouvre l’accès à la carte de séjour temporaire aux étrangers dont les attaches personnelles et familiales sont en France, et elle instaure une protection contre l’éloignement des étrangers malades.

 

*** Le 2 octobre 1997, signature du Traité d’Amsterdam qui entrera en vigueur le 1er mai 1999. Il introduit dans le Traité instituant la Communauté européenne un article 63 prévoyant, d’une part des mesures relatives à l’asile, d’autre part des mesures relatives aux réfugiés et aux personnes déplacées.

 

 

1997-2002 : des retours partiels sur la réglementation sécuritaire antérieure

 

Le gouvernement constitué après le changement de majorité parlementaire de juin 1997 engage une vaste opération de régularisation de sans-papiers. Sur la base d’une circulaire Chevènement, 80 000 personnes seront régularisées sur 140 000 demandes.

 

La loi Guigou du 16 mars 1998 sur la nationalité revient en partie sur la loi Pasqua de 1993. La loi Chevènement du 11 mai1998 ne revient pas non plus sur l’ensemble des lois précédentes, mais contient des mesures essentielles : droit au séjour permanent pour les ressortissants de l’Union européenne, mise en place d’une commission consultative du séjour dans chaque département, élargissement d’accès aux titres de séjour en faveur des malades, allongement à 12 jours de la rétention administrative, valorisation de l’asile constitutionnel et création de l’asile territorial géré par le ministère de l’intérieur.

 

La cohabitation 1997-2002 ne permet pas de promouvoir, au-delà de ce qui précède, la réglementation de l’immigration et de l’asile.

 

*** Le 27 décembre 2000, adoption au sommet de Nice de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne. Elle sera reprise par le Traité de Lisbonne en 2008.

 

 

2002-2012 : développement d’une politique sécuritaire de caractère essentiellement politique sous influence croissante de l’Union européenne dans la perspective d’un régime d’asile européen commun

 

Alors que le contexte économique était largement déterminant des politiques migratoires au cours des décennies suivant la deuxième guerre mondiale, les motivations politiques ont pris le relais. Deux lois marquent la relance d’une politique qui distingue clairement immigration et asile.

 

*** Le règlement Dublin II sur l’Etat responsable est adopté le 18 février 2003.

 

La loi Sarkozy du 20 novembre 2003 durcit les conditions d’accès aux cartes de résident et de séjour, porte de 12 à 32 jours la durée maximale de rétention administrative, renforce le contrôle des maires sur les conditions d’hébergement, mais établit aussi des protections contre l’expulsion des étrangers ayant de fortes attaches en France. Le délai au b out duquel un conjoint de Français peut demander une carte de résident passe de un à deux ans. Institution du délit de « mariage de complaisance ». Création d’un fichier d’empreintes digitales et de photographies des demandeurs de visas.

 

La loi Villepin du 10 décembre 2003 sur l’asile remplace l’asile territorial par la protection subsidiaire ; anticipant sur la transposition de directives européennes, elle introduit les notions de pays d’origine sûrs, d’asile interne ; elle rend plus sévères les conditions d’admission au séjour et l’examen des demandes en procédure prioritaire. Des décrets sur l’asile sont publiés le 14 août 2003 qui décident la création de l’agrément des associations de domiciliation et de justificatif de résidence au bout de quatre mois ; des délais raccourcis sont fixés pour délivrer une première autorisation, pour déposer une demande d’asile et pour  l’examen par l’OFPRA.

 

*** Directive du Conseil de l’Union européenne du 29 avril 2004, dite « qualification », elle a fait l’objet d’une refonte par la directive du Parlement du 13 décembre 2011. Cette directive retient un ensemble minimal de garanties pour la reconnaissance de la qualité de réfugié ou l’octroi de la protection subsidiaire.

 

*** Les 4 et 5 novembre 2004 : adoption par les Etats membres de l’Union européenne d’un programme visant, à l’horizon 2012, l’instauration d’un « régime d’asile européen commun ».

 

*** Directive du Conseil de l’Union européenne du 1er décembre 2005 dite « procédure ». Elle assure aux demandeurs d’asile les mêmes garanties minimales en première instance.

 

Le 1er mars 2005 entre en vigueur le Code de l’entrée, du séjour, des étrangers et du droit d’asile (CESEDA) ; l’ordonnance du 2 novembre 1945 est abrogée ainsi que la loi relative au droit d’asile du 25 juillet 1952. Le 24 mai 2005 est créé le Comité interministériel de contrôle de l’immigration (CICI). Le 24 juillet 2006 est promulguée la loi sur l’immigration et l’intégration. Elle prévoit : réglementation plus stricte du regroupement familial, carte de séjour pour un conjoint de Français différée à 3 ans, carte de séjour subordonnée à l’obtention préalable d’un visa de long séjour, nécessité de validation de son projet par son pays d’un étudiant demandant un titre de séjour, possibilité d’assortir un refus de séjour d’une OQTF, critères professionnels et régionaux pour l’immigration « choisie ».

 

Le 18 mai 2007, à l’occasion de la formation d’un nouveau gouvernement, est créé le ministère de l’Immigration, de l’intégration, de l’identité nationale et du codéveloppement. Le 20 novembre 2007, la loi Hortefeux relative à la maîtrise de l’immigration, à l’intégration et à l’asile prévoit que la Cour nationale du droit d’asile (CNDA) remplace la Commission des recours des réfugiés (CRR) ; l’OFPRA passe  sous le contrôle du ministère de l’Intérieur. Un décret du 30 décembre 2008 modifie sensiblement l’organisation de la CNDA. La condition d’entrée régulière pour bénéficier de l’aide juridictionnelle est supprimée à compter du 1er décembre.

 

*** Ratification le 8 février 2008 du traité de Lisbonne par le Parlement français après le rejet du projet de Constitution européenne par référendum le 26 mai 2005. Il remanie l’article 63 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne pour prévoir « une politique commune en matière d’asile ».

 

*** Directive du Parlement de l’Union européenne dite « retour » du 18 juin 2008. Elle prévoit notamment : l’allongement des durées de rétention, de la durée d’interdiction de séjour, le développement de  l’externalisation.

 

*** Le 7 mai 2009, adoption par le Parlement européen d’un « paquet asile ».

 

Le 1er janvier 2009, la CNDA passe sous la tutelle du Conseil d’État. Le 2 novembre 2009 est lancé le débat sur l’identité nationale. Suite au discours de Grenoble de Nicolas Sarkozy du 30 juillet 2010, une circulaire du 5 août 2010 du ministre de l’Intérieur est prise contre les campements illicites de Roms, circulaire annulée par le Conseil d’État le 7 avril 2011.

 

Depuis le 1er janvier 2011, l’aide juridictionnelle devant la CNDA doit être demandée dans le mois suivant la notification du dépôt du recours. La loi Besson du 16 juin 2011 relative à l’immigration, à l’intégration  et à la nationalité procède à plusieurs réformes conséquences pour plusieurs d’entre elles de la transposition de directives européennes (retour, carte bleue, sanctions d’employeurs) : création d’une « charte des droits et des devoirs du citoyen » à laquelle doivent souscrire les personnes naturalisées, création d’une carte bleue pour faciliter l’accès au travail de travailleurs étrangers très qualifiés, extension de la durée maximale de rétention administrative de 32 à 45 jours (exception de prolongement en cas de menace terroriste), sanctions contre les employeurs de travailleurs étrangers sans titres de séjour, atténuation des menaces concernant les associations protectrices, restriction au séjour des étrangers malades. En matière de droit d’asile, la loi prévoit, en particulier, l’élargissement des zones d’attente hors des contrôles frontaliers en cas d’arrivée en nombre d’étrangers, extension du refus du séjour en cas de fraude à l’entrée, recours accru aux moyens audiovisuels en audience.

 

*** Refondation de la directive « qualification »  du 29 avril 2004 par la directive du Parlement du 13 décembre 2011. Elle prévoit notamment : des définitions plus précises  des notions d’acteur de persécution, d’asile interne, l(élargissement du champ des bénéficiaires de la protection, et surtout le principe d’alignement du statut  de réfugié et de la protection subsidiaire.

La directive du 1er décembre 2005 dite ‘procédure » fait l’objet d’un projet de refonte.

 

 

 

Si cette rétrospective ne permet pas de théoriser l’évolution des politiques d’immigration et d’asile, on peut néanmoins identifier les principaux facteurs ayant pesé sur cette les changements intervenus sur la période  : le niveau de l’activité économique, les orientations de l’État de droit, l’influence de l’Union européenne.

 

 

Statistiques de l’asile : évolution de 2010 à 2011

(sources : rapports annuel 2012 du Conseil d’Etat et de l’OFPRA)

L’observation de l’évolution de l’asile est particulièrement complexe car, outre les difficultés conceptuelles tenant à la définition des catégories, elle s’exprime dans une procédure qui n’est pas réductible à l’année civile. Elle est marquée par des déplacements de bases et des changements structurels, concernant les nationalités notamment,  qui rendent les comparaisons annuelles discutables. Les évaluations qui suivent sont tirées, directement ou indirectement des rapports 2010 et 2011 de l’OFPRA et de la CNDA (inclus dans le rapport annuel du Conseil d’Etat) publiés simultanément en avril 2012.

 

Demandes d’asile en progression

 

Le total des demandes (premières demandes, mineurs accompagnants et réexamens inclus) a atteint 57 337 en 2011 contre 52 762 en 2010 (+ 8 ,7 %).

 

Les premières demandes sont passées de 36 931 en 2010 à 40 464 en 2011. La croissance des demandes est régulière depuis 2007, année où le nombre des primodemandeurs s’élevait à 23 804.

 

En 2011, l’OFPRA a  enregistré 5 190 demandes de réexamen en hausse de 10,7 % sur l’année précédente, accompagnant ainsi la hausse des flux, la part des réexamens dans le total des demandes demeurant stable : 9 %. La procédure prioritaire a représenté 26 % de la demande globale.

 

Forte hausse des décisions prises

 

L’OFPRA a pris (hors mineurs accompagnants) 43 377  décisions en 2011 contre 37 789 en 2010 (+ 12,1 %).

 

La CNDA a pris 34 595 décisions en 2011 contre 23 946 en 2010 (+ 44,6 %).

 

Faible progression de la part des ordonnances

 

Les ordonnances ont progressé de 5 096 en 2010 à  7 619 en 2011 (+ 49,5 %), soit un peu plus que la progression des décisions de la CNDA.

 

Celle progression est principalement le fait des ordonnances dites « nouvelles » qui ont progressé de 2965 à 4 706 ( + 58,7 %).

 

Les ordonnances représentent 21,9 % des décisions en 2011 contre 21 % en 2010. Les ordonnances dites « nouvelles » en représentent     13,6 % contre 12,4 % en 2010.

 

Taux d’admission en baisse

 

Au total le nombre d’admissions s’est élevé à 10 753 en 2011 contre 10 340 en 2010. Le taux d’admission s’est élevé à 25,3 % en 2011 contre 27,4 % en 2010. Ces derniers taux se divisaient en 2011 en 10,9 % pour les admissions de l’OFPRA (13,5 % en 2010) et 14,4 % par annulation par la CNDA de décisions de rejet de l’OFPRA (13,9 % en 2010).

 

La baisse du taux global est donc imputable à la diminution des admissions de l’OFPRA, y compris en valeur absolue de 5 096 à 4 630 de 2010 à 2011.

 

Diminution des demandes en provenance des pays d’origine sûrs (POS)

 

L’OFPRA a enregistré 3 146 demandes, en provenance des POS, en baisse de 15 % sur 2010.  Ces demandes représentent 6,9 % du total des demandes en 2011 contre 8,9 % en 2010. 77 % des demandes proviennent des Balkans et concernent principalement la situation des roms. Le taux d’admission par l’OFPRA a diminué de 11 % en 2010 à 7 % en 2011 ; la baisse s’explique par le retrait du Mali (pour les femmes) de la liste.

 

Augmentation de la part de la protection subsidiaire

 

La part de la protection subsidiaire dans l’ensemble des décisions a atteint, globalement, 22,8 % en 2011 contre 19,7 % en 2010. Ces taux correspondent, en 2011, à un taux d’octroi de 27,5 % par l’OFPRA et de 19,4 % par la CNDA, contre, en 2010, 20,2 % par l’OFPRA et 19,5 % par la CNDA.

 

La hausse de la part de la protection subsidiaire est donc essentiellement due à l’OFPRA.

 

Progression du taux d’admission à l’aide juridictionnelle

 

Il a atteint 80,2 % des demandes en 2011 contre 73,1 % en 2010

 

Persistance d’un taux de renvois élevé.

 

Il s’est élevé à 28,6 % en 2011 contre 28,1 % en 2010.

 

Résultats contrastés des délais de traitement

 

Le délai moyen de traitement de la demande à l’OFPRA s’est élevé en 2011 à 5 mois et 24 jours contre 4 mois et 25 jours en 2010.

 

Le délai potentiel de jugement (rapport du nombre de dossiers en stock en fin d’année au nombre d’affaires traitées en une année) à la CNDA était de 9 mois et 5 jours fin 2011 contre 14 mois et 20 jours en 2010. La réduction du délai constaté moyen des formations collégiales est moindre : 11 mois et 10 jours en 2011 contre 12 mois et 27 jours en 2010.

 

Hausse des pourvois en cassation devant le Conseil d’Eta

 

Le Conseil d’Etat a enregistré 140 pourvois en 2011 contre 107 en 2010. En 2011, 21 pourvois l’ont été par le directeur général de l ;OFPRA, contre 22 en 2010. Les pourvois admis se sont respectivement élevés à

34 et 30 et les décisions censurées à 22 et 20.

Premiers titres de séjour délivrés par motifs en 2010

(Source : ministère chargé de l’immigration)

 Economique : 14 197 dont 12 655 salariés

Familial : 83 177 dont 49 833 familles de Français

Etudiants : 59 455

Humanitaire 18 220 dont 10 073 réfugiés et apatrides et 1759 protections subsidiaires

Divers : 11 311

TOTAL  189 371