« Au service de l’intérêt général » – POUR, revue de la Fédération syndicale unitaire (FSU) novembre 2007

Depuis la loi du 19 octobre 1946 le statut général des fonctionnaires a constamment évolué. Ce premier statut démocratique est étroitement lié aux avancées réalisées à la Libération après la 2ème guerre mondiale. Loin d’être sclérosé il représente une composante du pacte républicain. Les attaques qu’il subit touchent à des éléments essentiels de notre cohésion sociale, à l’opposé d’ une vision progressiste de l’évolution de l’administration.

Pour : Quels sont d’après vous les principes fondateurs auxquels il faut rester attaché?

La réforme de la fonction publique que j’ai initiée en 1983-84 repose sur trois principes fondateurs caractéristiques de la conception française : l’égalité, l’indépendance, la responsabilité. Ainsi le fonctionnaire, citoyen à part entière, n’est pas un sujet du pouvoir politique, ni de l’administration, mais assume une responsabilité importante car il sert l’intérêt général.

Pour : La société française bouge. Quelles sont les évolutions nécessaires ?

Le statut doit continuer à évoluer encore en fonction des besoins des citoyens à l’égard des administrations de l’État et des autres collectivités publiques, notamment territoriales. L’impact des évolutions technologiques et notamment l’informatique concerne au premier plan l’administration. La fonction publique est un modèle social pour l’ensemble de la société. Elle représente une référence qui pourrait, dans une certaine mesure, être transposée pour concevoir un « statut du travail salarié » tout au long de la vie.

Pour : Peut-on observer la Fonction Publique en France, et donc les services publics, sans considérer le contexte de mondialisation des échanges, de l’économie, de la communication?

Notre fonction publique, souvent qualifiée «d’exception française», est une des expériences les plus anciennes d’organisation administrative au service de l’intérêt général. A l’étranger, l’image de la fonction publique française est associée aux notions d’efficacité, de compétence et de non corruption. Elle y sert souvent de référence aux réformes statutaires. En Allemagne, il n’y a que 700 000 fonctionnaires au sens où nous l’entendons en France. Ils y occupent des fonctions régaliennes mais ne disposent de droits sociaux réduits. Les autres fonctions sont assurées par des employés sous contrat. Cette importance des contrats affaiblit la position du fonctionnaire vis-à-vis des pressions politiques ou de l’arbitraire administratif.

Pour : Quelles sont les problématiques actuelles ? Comment se déclinent-t-elles pour les fonctionnaires et les usagers?

Deux conceptions de la fonction publique s’opposent. La Fonction publique d’emploi organise un certain nombre de métiers sans perspective d’évolution significative et dont les rémunérations relèvent d’un cadre plus ou moins contractuel. Dans la fonction publique de carrière, le fonctionnaire est titulaire de son grade, et son emploi est à la disposition de l’administration. Cette séparation caractérise la spécificité française.
Ceci étant, il faudrait modifier le statut général pour améliorer la mobilité insuffisante, les conditions de détachement d’une administration à l’autre, la promotion et l’accès des femmes aux emplois supérieurs de la fonction publique. Il faut abroger la loi Galland de 1987, qui avait marqué un retour de la fonction publique territoriale vers une fonction publique d’emploi et encouragé le recrutement de contractuels.
Nos services publics offrent des garanties aux usagers. Il faut trouver les formes adéquates pour recueillir leurs avis et leurs attentes en prenant appui sur une évaluation sérieuse des politiques publiques.

Pour : Comment comprendre l’adhésion , même relative de l’opinion publique à la volonté de diminution du nombre de fonctionnaires, alors que cela conduira à la réduction des services publics?

Ceux qui mettent en avant l’intégration forcée de notre pays dans l’union européenne telle qu’elle est aujourd’hui et veulent assujettir à toute force notre société à une mondialisation dominée par le mouvement du capital et la rentabilité rencontrent en France une fonction publique animée par une logique de démocratie et d’efficacité sociale. Notre fonction publique est un obstacle à la logique du marché. Il y a une contradiction entre notre conception de la fonction publique, et le contrat prôné aujourd’hui par Nicolas Sarkozy, à l’instar de modèles étrangers.
La loi, comme le précise l’article 6 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, est l’expression de la volonté générale. Les fonctionnaires en sont les acteurs de premier rang. Nous avons donc de bonnes raisons de défendre la conception française au plan international et notamment, dans le cadre de l’Europe actuelle.

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