(Schéma)
Le service public dans l’actualité syndicale et politique. Mais aussi un thème d’approfondissement idéologique.
I. LA CONCEPTION FRANÇAISE DE L’INTERÊT GÉNÉRAL, DU SERVICE PUBLIC, DE LA FONCTION PUBLIQUE
Ces idées se sont forgées en plusieurs siècles : création du Conseil d’État du Roi sous Philippe Le Bel à la fin du XIII° siècle, articles 1er et 17 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen sous la Révolution, Révolution de 1848, École française du service public à la fin du XIX°, statut général des fonctionnaires en 1946. Ces notions se sont incarnées dans des personnages historiques importants : de Richelieu à de Gaulle.
1.1. L’intérêt général
Les économistes néo-classiques ne sont parvenus à définir qu’un « optimum social », préférence révélée des consommateurs. Le citoyen ne se réduit pas à un consommateur ni à un producteur ?
Le juge administratif a considéré que c’était au pouvoir politique de le définir dans un débat démocratique. Il en a fait cependant usage mais de façon subsidiaire dans l’application du principe d’égalité. Il a identifié des activités relevant de l’intérêt général.
Il siège dans les notions de déclaration d’utilité publique, d’ordre public. Les « actions positives » doivent être proportionnées à la différence des situations ou à l’intérêt général invoqué.
1.2. Le service public
Une notion simple à l’origine : une mission d’intérêt général, une personne morale de droit public, un droit et un juge administratifs. Couverture par l’impôt et non par les prix. Prérogatives de service public.
Une notion devenue complexe : interpénétration public-privé (régie, concession, délégation). Hétérogénéité croissante, développement du secteur associatif, le contrat le dispute à la loi.
Contradiction exacerbée dans le cadre de l’Union européenne dont les critères sont essentiellement économiques (« Économie de marché … »), le service public ignoré (sauf art. 93 du traité FUE), définition des SIEG et des SIG, Jurisprudence de la CJCE tend à faire une place cependant aux acticités d’intérêt général ; le régime de la propriété n’est pas préjugé (art. 345). Importance des services publics dans le rejet du traité constitutionnel le 29 mai 2005.
1.3. La fonction publique
Création ancienne d’une administration centralisée. Principe hiérarchique dominant. Création de règles jurisprudentielles et rejet de la notion de « statut carcan » par les syndicats. Statut de 1941 sous Vichy. Statut du 19 octobre 1946. Redistribution législatif-réglementaire en 1959.
L’élaboration du statut actuel en 1981-1986 : les 3 principes d’égalité, d’indépendance, de responsabilité). La conception du fonctionnaire-citoyen opposée au fonctionnaire-sujet (Michel Debré). Une fonction publique à « trois versants » (FPE, FPT, FPH).
Montée en puissance des personnels sous statut : 200 000 fonctionnaires début XX° siècle, 1 million en 1946, 2,1 millions en 1981, 5,3 millions aujourd’hui ; 146 articles législatifs en 1946, 57 en 1959, plus de 500 aujourd’hui ; la plus grande longévité contre la prévision de F. Mitterrand en 1986.
II. UNE OFFENSIVE SANS PRÉCÉDENT CONTRE CES ACQUIS HISTORIQUES
Selon Marcel Gauchet, la stratégie de Sarkozy c’est la « banalisation » de la France. La France, une somme d’ « anomalies » : le modèle d’intégration, la laïcité, le service public, les collectivités territoriales, etc ?
Le pragmatisme destructeur contre l’ « ardente obligation ». L’ « identité nationale » comme contre-feu.
2.1. La réduction de la dépense publique
Des précédents, la commission de la Hache dans les années 1950, la RCB, la LOLF (34 missions, 132 programmes, 620 actions) et sa « fongibilité asymétrique ».
La RGPP : non remplacement d’un fonctionnaire sur 2 ; plus de 300 mesures administratives, pas de concertation. Le démantèlement de l’ « administration rationalisante » CGP, CNE, HCEP, HCCI, CIRA, DP, CECRSP, INSEE, A de F, etc.
Primauté à la « main invisible » sur la main visible : réhabiliter la planification, les nationalisations, les institutions.
2.2. Démantèlement des services publics et de la fonction publique
Une spécificité française : une fonction publique de 5,3 millions, environ 6 millions avec les entreprises et organismes publics (un quart de la population active). Un môle de résistance au marché et à la contratualisation.
L’attaque n’a pas commencé acec Sarkozy : loi Galland du 13 juillet 1987 (+ 3° voie ENA, loi sur droit de grève 19 octobre 1982). La Poste et France Télécom en 1990 (P. Quilès), Air France 1999 (J-C. Gayssot), rapport du Conseil d’État 2003, lois de modernisation du 2 février 2007, sur la mobilité du 3 août 2009. Les gouvernements de gauche ne reviennent pas sur les atteintes de la droite.
La « révolution culturelle » de Sarkozy du 19 septembre 2007. Le Livre Blanc de J-L. Silicani (contrat contre loi, métier contre fonction, performance individuelle contre efficacité sociale). La crise révélatrice du rôle d’ « amortisseur social » du service public (emploi, pouvoir d’achat… éthique). Le « Grand soir statutaire » n’aura pas lieu.
2.3. La réforme des collectivités territoriales
Pas de « mille-feuilles » mais 2 triptyques : commune-département-nation (politique) contre agglomération-région-Europe (économique). L’invocation de l’extérieur (délocalisation, régions, métropoles) comme justification de l’aménagement du territoire (St-Dizier 20 octobre 2009).
Les dispositions majeures pernicieuses : conseillers territoriaux, métropoles, suppression de la taxe professionnelle.
Les conséquences : détérioration de la situation matérielle et morale des fonctionnaires (effectifs, contractualisation, clientélisme), des services publics (8 directions dans les régions, 2 à 3 dans les départements, intrusion du privé), rôle du préfet de région véritable proconsul.
III. LA CONTRE-OFFENSIVE NÉCESSAIRE : LE XXI° SIÈCLE « ÂGE D’OR » DU SERVICE PUBLIC ?
Défendre les services publics, mais surtout inscrire leur promotion dans une perspective.
3.1. Se positionner sur les valeurs et principes
Le pouvoir ne néglige pas les valeurs : 75 des 146 pages du Livre Blanc Silicani.
Réaffirmer les valeurs et principes de l’intérêt général, sur le service public et la Fonction publique précédemment évoqués.
Plus généralement : se réapproprier l’histoire, la science, la morale.
3.2. Faire des propositions constructives à tous niveaux
Ce pouvoir peut être tenu en échec : de la révolution culturelle, de la suppression du classement se sortie des écoles de la fonction publique ; critique du non remplacement d’un fonctionnaire sur deux par P. Séguin. Dissensions sur la taxe professionnelle, l’élection des conseillers territoriaux. Promesse aventureuse de titularisation des contractuels …
Faire des propositions concernant le service public et la fonction publique : par exemple reclassement indiciaire, fin contractualisation, double carrière, conditions de mobilité, dialogue social, égalité hommes-femmes, etc.
Approfondissement de questions majeures : planification, nationalisations, institutions, laïcité, etc. « États généraux du service public » (Mutualité, 17 décembre 2009).
3.3. Le service public « valeur universelle » ?
La montée de l’ « en commun » : protection de l’écosystème mondial, propriété des ressources du sol et du sous-sol, des produits alimentaires, projets industriels internationaux, mondialisation de services, des échanges, de la culture, etc.
La prise de conscience de l’unité de destin du genre humain caractéristique majeure du moment historique : « Terre-Patrie », le « Tout-Monde », « Patrimoine commun de l’humanité », « Biens à destination universelle », etc.
Le service public, valeur universelle. La contribution de la conception et de l’expérience française. Le XXI° siècle « âge d’or » du service public.
Monsieur,
Le Collectif Biatoss P7 (université Paris Diderot) est né de la mobilisation de l’année dernière. Tout d’abord solidaires des enseignants-chercheurs dans leur combat contre le décret sur la modulation des services et la mastérisation, les personnels BIATOSS des universités se sont réunis en coordination nationale pour porter leurs propres revendications. La résignation semble maintenant à l’ordre du jour, les réformes semblent inévitables et au final ne soucient pas trop les collègues il faut bien hélas en faire le constat. A l’université Paris 7 notre collectif reste en veille. Nous sommes conscients que crier à la casse du service public ne sert pas, plus, à grand chose. Les collègues n’y croient pas vraiment, que dire alors de l’opinion publique qui se dit attachée au service public mais croit deviner en chaque fonctionnaire un privilégié…. RGPP, PFR…. entretiens professionnels, évaluation individuelle, salaire au mérite, fiches de poste… autant d’outils du démantèlement du service public… Le Collectif BIATOSS P7 souhaite ouvrir un débat de qualité sur ces réformes.
Ces réformes contre lesquelles il est difficile de lutter car elles sont diffuses, sur plusieurs fronts, masquées…
Nous avons le souhait d’organiser une série de tables rondes où nous convierons Biatoss, enseignants-chercheurs, étudiants. Tous acteurs de l’université mais aussi tous citoyens.
Nous souhaitons lancer le débat sur l’évaluation individuelle, le salaire au mérite mais, et c’est plus délicat car plus technique sur la PFR.
Parce que nous nous sommes servi de vos mots, tirés de ce blog, pour rappeler aux collègues les fondements de la fonction publique, parce que votre expérience de la fonction publique dont vous avez été ministre… parce qu’une certaine affinité d’analyse et de projet de société…
Nous souhaitons vous inviter à participer à une table ronde.
Notre université est un peu particulière, ce serait trop long à expliquer ici, mais (bien que ) passée aux compétences élargies, nous avons à la présidence une équipe prête à nous aider à ouvrir le débat.
Parce que nous entendons trop souvent qu’il faut prendre le train des réformes pour ne pas rester à quai et que cette image nous répugne, parce que dans cette période de morosité et de résignation nous avons encore des sursaults de révolte
Parce que tout simplement nous pensons que l’information sur les réformes n’est pas passée…
Parce qu’avant de baisser les bras nous voulons dire, expliquer, exposer….
… Nous avons besoin de vous
Merci de votre attention,
Solidairement,
Julia pour le Collectif BIATOSS P
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Bonsoir,
Je veux bien vous aider et réfléchir avec vous dans la mesure de les moyens et de mes disponibilités qui sont limitées car j’ai une activité chargée sur les qquestions que vous évoquez. Une synthèse est en effet donnée par l’article au pied duquel vous avez fait vbotre commentaire dont je vous remercie.
Bien cordialement,
Anicet Le Pors
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