Actualité du programme du CNR

 

Le Programme du Conseil National de la Résistance (CNR) a été acté le 15 mars 1944. Il marquait un regroupement politique d’ampleur autour d’aspirations largement partagées au sein de la nation. C’était un plan d’action immédiat hautement transformateur mais inévitablement limité par les conditions d’un accord entre représentants politiques différents et par les caractéristiques de la société de l’époque.

 

Un ambitieux plan immédiat de transformations démocratiques

On n’en rappellera que quelques dispositions essentielles. Le Programme du CNR affirme tout d’abord la restauration de l’indépendance, le châtiment des traites et la confiscation de leurs biens

Il comporte d’importantes mesures économiques : l’éviction des puissances financières dominantes, le retour à la nation des grands moyens de production monopolisés (énergie, ressources du sous-sol, compagnies d’assurance, banques), le développement des coopératives agricoles. L’intervention des travailleurs dans l’entreprise est soulignée : participation à la gestion, droit au travail et amélioration des relations contractuelles, renforcement de l’intervention des syndicats.

En matière sociale les réformes sont particulièrement importances : instauration de la sécurité sociale, promotion de l’éducation nationale, amélioration du pouvoir d’achat, des retraites, de la condition paysanne.

Le texte proclame aussi le rétablissement des libertés individuelles et publiques, la subordination des intérêts privés à l’intérêt général, l’extension des droits des populations indigènes et coloniales.

Le programme du CNR ne doit pas être fétichisé. Il ne doit pas être réduit à la lettre aussi importantes soit elle. Il est vivant autant par ce qu’il contient que par ce qu’il suggère des valeurs de l’époque qui portent encore enseignement aujourd’hui.

 

Certaines de ses dispositions formelles sonnent aujourd’hui comme un rappel à l’ordre.

Ainsi, il y affirme à deux reprises la supériorité de l’intérêt général sur les intérêts particuliers. Qui contestera que l’échec qui a conclu de « XX° siècle prométhéen » a sapé les bases de l’intérêt collectif qui reste aujourd’hui à reconstruire. La question des services publics pour la satisfaction des besoins fondamentaux reste de grande actualité.

L’une des conséquences de cette affirmation c’est la place faite à la propriété des moyens de production et de financement pour conduire une politique volontariste. Dans les années 1970 on disait encore, en écho, « Là où est la propriété, là est le pouvoir ». Que dit-on aujourd’hui sur ce sujet ? Pas grande chose. Il faut remettre la question sur le chantier.

Autre affirmation majeure : la place faite aux travailleurs dans la définition de la politique économique, la gestion des entreprises, voire leur direction. On est aujourd’hui sur une autre planète. Mais nous tirons de ce programme comme de l’expérience de 1981-1984 l’idée de la nécessité de lier étroitement : satisfaction des besoins essentiels par la définition de politiques publiques efficaces – appropriation sociale des grands moyens de production, des instruments décisifs de l’économie – intervention des travailleurs.

 

Mais le programme du CNR vaut aussi, et peut être surtout, par l’esprit qui a animé ses rédacteurs et l’élan qu’il encourage

Ainsi il faut se garder de tout anachronisme. Si le programme du CNR ne parle pas des institutions, par exemple, c’est qu’il y avait sur ce point des avis très contradictoires : le général de Gaulle – et donc ses représentants – inclinait en faveur d’un régime présidentiel du type de celui des États Unis, tandis que la plupart des partis représentés (communiste, socialiste, démocrate chrétien) optaient en faveur d’un régime parlementaire. Mais cela ne diminue évidemment en rien l’importance de la question et la nature, profondément démocratique, du programme qui faisait une large place à l’intervention des citoyens, qui était fondatrice du débat. Son influence sur la rédaction du Préambule, toujours en vigueur, de la Constitution du 24 octobre 1946 est évidente.

Il n’est pas non plus question du statut général des fonctionnaires qui ne naitra qu’avec la loi du 19 octobre 1946, deux ans et demi plus tard. La raison est que, jusque-là, les organisations syndicales de fonctionnaires étaient hostiles à ce qu’elles appelaient un « statut-carcan » ; d’ailleurs le premier statut des fonctionnaires avait vu le jour le 19 septembre 1941 sous Vichy. Il a donc fallu beaucoup de courage et de lucidité aux acteurs de l’époque pour effectuer ce contre-pied démocratique. Il n’y a pas de doute : c’est le contexte créé par le programme du CNR qui y a conduit.

Mais ce qui est le plus utile aujourd’hui, c’est le refus de la fatalité. Les dangers de 1944 ne sont plus ceux d’aujourd’hui avec la crise, économique mais aussi systémique et de civilisation. « Les jours heureux ! » restent à l’ordre du jour.

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